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GAULLE Charles de.
4 L. A. S., 17, 18, 20 et 22 novembre 1914 à sa mère Jeanne de Gaulle à Paris ; 4 pages in-8 avec enveloppe, 1 page in-12 avec adresse au verso (Carte postale militaire, Troupes en campagne), 4 pages in-8 avec enveloppe, 1 page in-12 avec adresse au verso (carte de Correspondance militaire) ; au crayon-encre.
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Complete Description

GAULLE Charles de.
4 L. A. S., 17, 18, 20 et 22 novembre 1914 à sa mère Jeanne de Gaulle à Paris ; 4 pages in-8 avec enveloppe, 1 page in-12 avec adresse au verso (Carte postale militaire, Troupes en campagne), 4 pages in-8 avec enveloppe, 1 page in-12 avec adresse au verso (carte de Correspondance militaire) ; au crayon-encre.

Quatre lettres des tranchées.


17 novembre. « Tous ces jours-ci le temps est bien mauvais. Il pleut souvent à verse et dans nos tranchées il est bien difficile d’avoir les pieds secs. Nous aspirons à une gelée qui nous permettra de marcher sur un sol ferme, car, couverts comme nous le sommes, nous ne craignons pas le froid. L’ennemi est bien sage en face de nous, sauf quelques bourrasques de coups de canon d’heure en heure. Il donne l’impression de vouloir avant tout qu’on lui fiche la paix par ici. Mais nous le dérangeons de notre mieux. D’après les renseignements que nous avons, les attaques furieuses qu’il dirige depuis quinze jours successivement sur chaque point d’appui de Nieuport à Arras ont régulièrement échoué, et dans de telles conditions que chacune de nos contre-attaques nous livrait des prisonniers. Enfin la supériorité d’artillerie nous est désormais acquise grâce à l’entrée en ligne récente de nos canons lourds tout neufs, et cela suffit à rendre vains ses efforts désespérés pour obtenir par ici un succès décisif au mois de novembre afin de commencer une nouvelle campagne contre les Russes. Ces derniers ne peuvent du reste prendre une vraie offensive avant le mois de décembre où les gelées permettent à leurs canons et à leurs voitures de traverser sans s’embourber la Pologne et la Prusse orientale. En effet, une fois entrés chez l’ennemi, ils ne doivent plus compter sur leurs chemins de fer. Décembre verra donc sans doute la suprême grande bataille des Russes contre les Allemands renforcés et les Autrichiens reformés. Il est certain que ce sera pour nos alliés une troisième victoire suivie d’une invasion désormais rapide »… Il s’inquiète des nouvelles de Charleroi.

 

18 novembre. « Ma bien chère Maman, Rien de bien nouveau en ce qui me concerne, sinon que notre repos relatif de ces derniers jours se termine ce soir. La nuit prochaine, nous passons de nouveau en première ligne, mais cette fois en dehors des bois, ce qui nous enchante. Il gèle le matin maintenant. Puisse-t-il geler désormais tous les jours et tout le temps pour que nous soyons débarrassés de la boue, ennemi redoutable des troupes qui ne bougent guère. Le moral de tous continue d’être excellent. Il est dorénavant établi à la face du monde que notre armée, plus puissante que jamais moralement et physiquement après quatre mois de guerre bientôt, est un instrument merveilleux et elle le fera de mieux en mieux sentir »…

 

20 novembre. Il remercie de l’envoi de paquets : « Papier à lettres, cigares, lampe électrique, bloc-notes, cure-dents ont été les très bienvenus. Vous mettriez un comble à votre bonté en m’envoyant une paire de gants fourrés, car ceux que j’avais sont déchirés et usés complètement. Il nous arrive plusieurs fois par jour en effet d’user de la marche à quatre pattes, ce qui n’arrange pas les gants. Prenez-les-moi, chauds bien entendu, mais aussi fort grands, 8 au minimum. Rien de bien nouveau par ici en ce sens que les fronts ne changent guère, mais cela pourrait bien ne plus durer beaucoup. Dans tous les cas, nous tenons le bon bout. […] Ici, toujours le froid. Il gèle fort jour et nuit et comme le temps est fort clair nous ne pouvons faire de feux en première ligne sous peine d’être aussitôt repérés et criblés d’obus. Nous devons donc battre la semelle et souffler sur nos doigts. L’ennemi en est bien entendu au même point que nous. C’est une grande consolation. Pourtant nous préférons de beaucoup ce froid sec à la gadouille de ces derniers jours. Ce que nous savons des Russes nous prouve que ce faisceau de forces immenses s’applique de plus en plus vigoureusement aux frontières de l’ennemi. Grâce à leur extrême activité militaire servie par de très bonnes communications, les Allemands ont parfois remporté contre les Russes de vrais succès. Ils en remporteront encore d’autres ; mais rien ne peut en définitive arrêter cette marée montante, et quant à nous, nous continuons de détruire l’ennemi, moralement et matériellement. Depuis le début de l’actuelle bataille, nous n’avons perdu en somme qu’un seul point d’appui, Dixmude, et nous en avons pris beaucoup d’autres »…


22 novembre. « Aujourd’hui j’ai 24 ans, et comme de juste, cet anniversaire est salué par une canonnade épouvantable toute la nuit et tout ce matin. Il continue de faire froid, mais un beau froid sec très supportable. Le seul ennui est que dans nos tranchées, on ne peut faire de feu en première ligne, car toute fumée se voit très bien aux jumelles dans le ciel pur et est saluée immédiatement d’une volée de coups de canon. Mais quand on est porté en 2e ligne (tous les 6 jours) la situation est plus agréable. […] Les Russes sont engagés avec les Austro-Allemands dans une bataille suprême. Il n’y a pas de doute qu’ils ne la gagnent. Mais il faut patienter quelques jours »…


LNC, I, p. 111, 112 et 113.


On joint une L. A. S. de Jeanne de Gaulle à son fils Charles, Paris, 10 août 1914 (7 p. in-8, enveloppe), disant son inquiétude alors que son fils a dû déjà prendre contact avec l’ennemi.


Provenance:
– Charles de Gaulle (1890 – 1970) ;
– Puis Philippe de Gaulle (1921 – 2024) ;
– Puis descendance.

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