Paris, Nouvellement imprimee… en la rue neufve Nostre dame A lêseigne de lescu de Frãce (atelier Trepperel), s.d. (ca 1505-1513).
Plaquette in-folio étroite, maroquin janséniste anthracite, milieu des champs biseauté, dos à 5 doubles nerfs, triple filet intérieur avec petits fleurons angulaires dorés, tranches dorées, étui (René Aussourd).
Bechtel, 283/F-38 // Pettegree, n° 19366 // USTC, 57503 // Manque aux autres bibliographies.
(30f.) / A8, B-E4, F6 / 55 ou 56 lignes, car. goth. / 85 × 270 mm.
Unique et rarissime édition d’une farce jouée au tout début du XVIe siècle et publiée concomitamment par les Trepperel.
Les farces, soties et moralités qui constituent le théâtre comique de la fin du XVe et du début du XVIe siècle étaient le plus souvent jouées dans les rues et, dans le même temps, publiées sous forme de brochures destinées aux directeurs de troupes, acteurs professionnels et amateurs. Elles étaient vendues bon marché, comme de la littérature populaire, raison pour laquelle peu d’entre elles sont parvenues jusqu’à nous.
Jean Trepperel, puis sa veuve et ses héritiers, s’étaient fait une spécialité des publications populaires vernaculaires : Ils ont imprimé des romans de chevalerie, des mystères dramatiques, des poèmes. Ce sont eux qui ont le plus vulgarisé, par leurs éditions, notre vieille littérature populaire (Claudin, II, p.162). Comme le souligne Droz, la publication des farces et des soties a le mérite de nous renseigner sur le goût du public, et du public parisien en particulier ; car il ne faut pas oublier que Trepperel, imprimeur-libraire à Paris, était un commerçant avisé, soucieux des préférences de ses clients.
La Farce Nouvelle moralisée à XIII personnages, dont on sait qu’elle fut jouée à Metz le dimanche de la Trinité en 1513 sur la place de la Chambre, en contrebas du terre-plein de la cathédrale (Droz), oppose, suivant le schéma classique du genre, des personnages allégoriques qui s’affrontent dans une joute verbale savoureuse. Ici, Franc Cueur, Feaulte et Doulx Parler font face à Langue envenimée qui, assistée de Danger, Satan, Bellezebut, Lucifer et Sultus (ou Le Fol), médit cruellement de Bonne Renommée en lui prêtant des aventures gaillardes : Autre chose ie ne procure / Fors que par tout mettre discors / Cest tout mon bien cest ma nature / que avoir tousiours langue hors.
Dieu intervient alors, envoyant Michel, soutenu par Lame (ou Anima), au secours des héros afin de les guider :
ク que ie donne la sentence Sur faulce langue envenimee Qui est orde et desfiguree
Cette farce est connue comme la trente-quatrième pièce du recueil dit Recueil Trepperel, réunion composite de trente-cinq farces, moralités et soties, regroupées en un volume découvert à la fin des années 1920 par le libraire florentin Léon Olschki. Acquis en 1928 par Edmée Maus, le Recueil Trepperel fut divisé par la nouvelle propriétaire, qui fit relier séparément chaque pièce. Au moment de leur acquisition groupée par la BnF en 1974, il manquait deux pièces, dont cette farce à treize personnages. Eugénie Droz, qui étudia l’ensemble pour en donner une édition moderne en 1966, en souligne déjà l’absence et précise qu’elle a dû, pour établir le texte de cette farce dans son Recueil Trepperel: fac-similé des trente-cinq pièces de l’original, travailler d’après des photocopies.
Dans son introduction, Eugénie Droz mentionne que la Moralité à XIII personnages… de langue envenimée présente des manques dus à des taches d’encre et des déchirures. Ces manques correspondent en tous points à ceux de notre exemplaire, ce qui nous permet d’affirmer que ce dernier est l’une des deux pièces manquantes au moment de l’acquisition par la BnF du Recueil Trepperel.
Notre exemplaire semble donc le seul connu.
Dos légèrement passé. 13 feuillets restaurés dont 8 sans atteinte au texte et 5 avec réparations importantes et manques de texte ; petites piqûres à une dizaine de feuillets.
Provenance :
Edmée Maus.