Sur un engagement dans les armées d’Orient et sur son rôle présumé.
11 février. « Le ministère de la Guerre a fait demander hier par télégramme le nom des officiers du CICC [Centre d’instruction des chars de combat] qui désireraient partir pour l’armée d’Orient. J’ai donné mon nom aussitôt, et avec joie. Comme je vous l’ai dit déjà, je n’avais demandé l’armée polonaise que comme un pis-aller pour faire campagne […] La dépêche ministérielle ajoutait que les officiers qui seraient désignés pour l’Armée d’Orient auraient à se tenir prêts à partir le 20 Février. Je suis prêt à partir demain si l’on me désigne. Mais je suis assez vieux routier pour ne pas m’émouvoir de cette date du 20 Février. Elle changera encore plusieurs fois. Sur 200 que nous sommes ici, une vingtaine à peine se sont fait inscrire. Et pourtant d’une manière générale, les officiers rapatriés qui se trouvent au premier cours sont les plus ardents ! En ce qui me concerne personnellement je me félicite de cette lassitude générale, car elle va, j’en suis convaincu, me permettre de me séparer à bref délai de ce triste peloton de coureurs.
Quel rôle est destinée à jouer cette armée d’Orient que l’on renforce sans cesse ? À mon avis, elle aura d’abord à tenir en respect les peuples balkaniques, et ceux qui sont issus du démembrement de l’Autriche et de la Russie : Ukraine, Pologne, Don, Roumanie, Serbie, Turquie, Grèce, Hongrie, Autriche allemande, Tchèques, à les empêcher autant que possible, de s’entre-dévorer de trop bonne heure, à y appuyer la formation de gouvernements qui nous soient favorables, à les contraindre de respecter les frontières qu’on leur tracera. Il s’agira encore de menacer le cas échéant la frontière Sud de l’Allemagne, à conserver nos communications directes avec la Pologne et la Russie, à barrer définitivement aux Allemands le chemin l’Orient. Un peu plus tard, les troupes que nous aurons là-bas auront sans doute à appuyer un mouvement des états conservateurs limitrophes de Russes (Finlande, Lithuanie, Pologne, Ukraine, Don, Roumanie, Sibérie), contre les foyers d’émeutes et de désordres, Moscou et Pétersbourg.
Ici, l’état moral est bon et à l’orage. On dit couramment que le Maréchal Foch va porter
les armées en avant à bref délai »…
26 février. « Pas de changements ici. On dit maintenant presque officiellement que le cours se terminera le 15 mars. Je vous écris à la hâte avant de me rendre au cours pour que ma lettre puisse partir ce matin, car ici, il n’y a qu’une levée par jour »…
LNC, I, p. 449 à 451.