Discours prononcé pour la distribution des prix à l’université Saint-Joseph à Beyrouth.
« Une assemblée est un concert de sentiments. La belle cérémonie qui nous réunit aujourd’hui ne laisse pas d’en susciter de nombreux : chez les maîtres, juste fierté de l’œuvre accomplie ; chez les disciples, joie du repos bien gagné ; chez les parents satisfaction du savoir acquis par leurs fils et sollicitude pour demain […] Quels que soient nos âges et nos fonctions, nous ressentons tous une émotion pareille à la vue de la belle jeunesse dont voici les rangs pressés. La jeunesse répand autour d’elle la contagion de l’ardeur. Imprégnée d’espérances, elle s’embellit par surcroît de toutes celles que ses aînés reportent sur elle. Après les épreuves traversées, nous mesurons mieux que jamais tout ce qu’il y a de précieux dans cette réserve de forces où la race des hommes puise pour se renouveler.
Certes c’est bien d’un renouveau qu’a besoin le monde. Jeunes gens de quel cachet marquerez-vous votre temps ? […] L’Hellénisme, la force romaine, la diffusion du Christianisme, l’ordre classique, la Révolution française, l’impérialisme récent, l’évolution sociale d’aujourd’hui, n’ont pas tenu seulement aux circonstances. Ces grands mouvements ne se concevraient point sans la flamme des esprits et des âmes, la passion pour un idéal. […] Oui, le dévouement au bien commun, voilà ce qui est nécessaire, puisque le moment est venu de rebâtir. Et justement, pour vous, jeunesse libanaise, ce grand devoir prend un sens immédiat et impérieux, car c’est une patrie que vous avez à faire. Sur ce sol merveilleux et pétri d’histoire, appuyés au rempart de vos montagnes, liés par la mer aux activités de l’Occident, aidés par la sagesse et par la force de la France, il vous appartient de construire un état. […] Point d’état sans sacrifices ! D’ailleurs, c’est bien de sacrifices qu’est sorti l’État du Liban. Le Beyrouth nouveau le sait, qui a consacré ses deux premiers monuments à la mémoire de vos Martyrs et à la gloire des soldats français. […]
Oui, la jeunesse libanaise, qui demain sortira d’ici, sera bien préparée à sa tâche
nationale. […] cette élite sera le ferment d’un peuple chargé désormais des lourds devoirs de la liberté. »
LNC, p. 728.
On joint le tapuscrit avec des corrections autographes (3 pages in-4).