Grand panneau comprenant au centre un tailleur à lunettes entouré de quatre personnages, et découpant une pièce de drap rouge. Au dessous, un pannonceau porte le nom de la boutique : AU NOUVEAU GOÛT, encadré de deux têtes d'enfant et de deux monstres à tête de vieille femme. De part et d'autre du tableau, deux motifs d'architecture surmontés d'une tête de maure enturbanné et deux danseuses jouant des cymbales. Au dessus, frise de rinceaux et de masques féminins.
186 x 84 cm. Dans une baguette en bois sculpté.


Un long texte manuscrit daté 1894 court sur toute la hauteur de la traverse verticale du chassis. Il rapporte dans un style choisi la " découverte " de ce panneau en 1893 à Nogent, sa restauration et son "identification " par un expert parisien du boulevard Saint-Germain.

Historique de cette toile

C'est en l'an de grâce 1893 qu'en face de la Grand' Fontaine dans la Boutique de M. Pinot (une véritable artiste armurier par profession antiquaire par goût) … découvrit qq. fragments de cette toile mutilée en onze morceaux. D'où venait-elle ? Pinot l'avait acquise pour cent sous du bon Floridas, le crieur des ventes, lequel l'avait exhumée vingt-cinq ans auparavant, du grenier d'un Sr Lecoconnier ancien horloger place du Marché. Avait-elle figuré un demi siècle auparavant devant l'établi du " petit Père Fontaine ", le tailleur de la rue Dorée n° 37 ? Certain vieux Nogentais mes devanciers s'imaginant la reconnaître. Acquise pour vingt francs, la voilà tant bien que mal ren collée, restituée par mon inexpérimenté pinceau, et surtout part qq. bonnes touches de mon ami M. Malot dr de nos écoles communales
quel peut-être ce tableau ? Par l'entremise de notre aimable voisin Mr Ménager, tapissier, la bande de sommet (Dragon des Hespérides) où figure une signature restée indéchiffrable pour mes moyens, fut transmise à l'un de nos compatriotes Mr Galleraud habile restaurateur de tableaux 35 rue de Navarin à Paris lequel eut recours à l'expérience du maître-expert en peinture Mr Guédy, juré de la ville de Paris, 168 boulevard Saint-Germain. A première vue et sans la plus petite hésitation, Mr Guédy reconnut et la signature et le genre de cette peinture qu'il déclara être de Meusnier , élève de Mr Desportes, peintre de l'époque du règne de Louis XVI. Brice (description de Paris) dénomine, en 1713, Meusnier, élève de Desportes, comme célèbre peintre d'architecture mêlant tous les genres) et au nombre des artistes logés au Louvre ; Les nouvelles archivers de l'Art français (année 1875, imprimerie Gouverneur) font de nombreuses mentions de cet artiste, Desportes, Cuypel, Meusnier déjà cité etc (V.p. 82, 83 88 etc) et de cette bande de peintres de talent qui parfois faisaient des fugues en province pour y exercer leur art. Maître Meusnier était-il de ceux-là ?
En dehors du mérite réel de son exécution, de l'originalité de la composition hétérogène, cette toile a la bonne chance de rappeler une de ces naïves enseignes qui, avant le numérotage égalitaire, décoraient la façade intérieure des simples boutiques de notre petite et habile industrie du siècle dernier. A ce titre, ce tableau ne méritait-il pas d'être sauvé ? Juin 1894 signé Gouverneur (?)