Dessin original, avec légende autographe " Le zèle " à la mine de plomb en haut à gauche. Mine de plomb, crayon rouge, encre et plume, 26, 5 x 20 cm sur papier pelure jaune, traces de bande adhésive.
Vive allégorie construite sur fond de vue aérienne : le zèle porte l'homme tel l'avion, et lui permet de franchir les montagnes et les rivières.
Cette composition, répertoriée dans le chapitre thématique " Les dessins du pilote " du catalogue des œuvres graphiques de Saint-Exupéry, s'apparente très nettement par son style, son sujet et sa technique à une autre allégorie, " La charité ", figurant dans le même catalogue parmi les " Feuillets de la comtesse de Voguë ", amie intime de Saint-Exupéry (n° 133 p. 95).
" J'ai découvert ce pour quoi j'étais fait : le crayon Conté mine de charbon " (Antoine de Saint-Exupéry). Le père du petit prince, qui reçut de sa mère le goût de la peinture et de la musique, dessina lui-même depuis l'enfance, et suivit des cours à l'école des Beaux Arts de Paris - dans l'idée de devenir architecte. Ayant pris une autre direction, il ne cessa cependant de pratiquer le dessin avec enthousiasme : " Je ne sais pas ce qui m'a pris ", écrit-il à sa mère en 1921, " je dessine toute la journée et de ce fait les heures me paraissent brèves. J'ai découvert ce pour quoi j'étais fait : le crayon Conté mine de charbon ". Saint-Exupéry utilisa toutes les techniques : mine de plomb, pastel, crayons de couleurs, gouache, aquarelle, et son style, qui évolua vers l'épure, passa par la veine symboliste à forts contrastes expressionnistes (dans son cahier de poésies calligraphiées à l'encre de Chine), le réalisme (les portraits des copains au service militaire à Casablanca), la caricature (autoportraits, portraits de ses proches et autres), et l'allégorie stylisée. Il a laissé des dessins à pleine page, et a orné de croquis ses manuscrits littéraires, ses lettres, et s'est même servi de toutes sortes de documents :
" Saint-Exupéry griffonnait constamment des dessins de circonstance, sur les livres qu'il donnait, sur des feuilles volantes, des nappes de restaurant, de vieilles factures. Son univers intérieur était peuplé d'êtres multiformes. Léon Werth, le dédicataire du Petit prince, rapporte qu'en même temps qu'il lisait, Saint-Exupéry "dessinait distraitement des bonshommes enfantins et lunaires sur des feuilles de papier qu'il jetait au plancher quand il n'y avait plus de place pour le moindre trait de crayon ou de stylo. S'il manquait de papier, il n'hésitait pas à dessiner sur le plateau de la table" " (Delphine Lacroix et Alban Cerisier).
Le Petit prince tient une place à part dans l'œuvre de Saint-Exupéry, car il en a conçu les dessins parallèlement au texte, pour l'édition, et y a trouvé son style le plus personnel et le plus abouti.
Les dessins de Saint-Exupéry ne sont presque jamais signés.
Bibliographie
- SAINT-EXUPERY (Antoine de). Dessins, aquarelles, pastels, plumes et crayons. Catalogue présenté et établi par Delphine Lacroix, avec le concours d'Alban Cerisier. [Paris], Gallimard, 2006. Reproduction n° 398 p. 259.