Collection Pierre Héron
Sans titre de circulation
Châssis n° 1011 / 507
Moteur n° S12
- Modèle unique
- État d'origine exceptionnel
- Historique fantastique
- Moteur à compresseur
L'aventure de la Hotchkiss-Grégoire, qui a tourné court avant même d'avoir atteint 250 exemplaires, ne décourage pas l'ingénieur Jean-Albert Grégoire qui en était le concepteur. Dès le mois de janvier 1955, il réunit les administrateurs de la société des Automobiles Tracta, créée en 1927 avec son ami Pierre Fenaille pour exploiter les brevets du joint homocinétique pour la traction avant, et leur propose un projet de voiture de sport ! JA Grégoire souhaite absolument prouver le bienfondé de ses solutions techniques et reprend les principes adoptés pour la Hotchkiss-Grégoire, en les améliorant. La nouvelle voiture aura donc une structure en alliage coulé, légère et rigide mais plus facile à fabriquer que la berline, et elle reprend la suspension à flexibilité variable qui donnait toute satisfaction. Les freins sont à disques sur les roues avant (une première en France sur une voiture de tourisme), avec un servo Dewandre, mais le moteur 4-cylindres à plat de la berline offre une puissance insuffisante pour une machine qui veut concurrencer les Jaguar XK ou Lancia Aurelia. Dans son ouvrage "Toutes mes automobiles", JA Grégoire raconte : "Un de mes clients de Hotchkiss-Grégoire avait monté un compresseur Constantin sur son moteur (...). Il me proposa un jour d'essayer son engin. Au volant, je fus stupéfait par le résultat obtenu. La voiture de série déjà nerveuse et rapide était spectaculairement améliorée aussi bien dans ses reprises que dans sa vitesse maximale qui atteignait 170 km/h." C'est ce qui incite Grégoire à adopter la même solution pour sa voiture. Ainsi, grâce au compresseur Constantin, la puissance passe de 75 à 125 ch à 4 500 tr/mn.
Reste à habiller cet ensemble intéressant. "Je n'essayais pas de donner à cet engin une forme aérodynamique," poursuit JA Grégoire. "Après la décevante expérience de la Hotchkiss-Grégoire, je ne voulais plus entendre parler de Cx, de maquettes et de passages en soufflerie." C'est une des rares fois où l'ingénieur fait passer sa "vérité mécanique" au deuxième plan, au profit de l'esthétique. La vitesse de pointe en pâtira, mais pas le charme de la voiture.
Grégoire fait donc appel à deux dessinateurs : Mario Boano en Italie et Carlo Delaisse en France. Les dessins du premier sont sans doute jugés trop extravagants et Grégoire opte pour la sobre élégance du trait de Delaisse qui ne souffre pas trop du long porte-à-faux avant. La fabrication de la carrosserie est confiée à Chapron, qui travaille toujours selon des méthodes traditionnelles, de qualité mais très consommatrices de main d'œuvre.
Le prototype est dévoilé en première mondiale lors d'un "International Sports Car Show" organisé au musée Ford de Dearborn. Il ensuite présenté en France et récolte les louanges de la presse pour son élégance, les journalistes attendant que le projet se traduise en véritable série industrielle. En janvier 1956, quatre carrosseries sont commandées par Tracta à Henri Chapron, mais la voiture se heurte rapidement au même problème que la Hotchkiss-Grégoire : son prix de revient élevé, en grande partie dû à la carrosserie trop artisanale. Les 3 500 000 francs réclamés sont à comparer aux 2 950 000 francs d'une Facel Vega, au V8 beaucoup plus puissant, ou aux 2 250 000 francs d'une Jaguar XK 140, plus performante... La séparation de Hotchkiss n'a pas arrangé les choses, privant Grégoire d'un réseau de distribution et d'entretien. S'y ajoutent des difficultés d'approvisionnement et de fabrication, si bien que le projet est condamné dans l'œuf. Finalement, seules voient le jours les quatre premières voitures commandées.
La voiture que nous proposons ici est l'une des quatre fabriquées, mais elle offre la particularité d'être l'unique coupé. Noëlle Chapron, auprès de qui le dossier complet de cet exemplaire incluant des échantillons de peinture et de cuir pourra être obtenu, nous a confirmé que sa commande avait été passée le 10 janvier 1956, puis que la voiture avait été livrée à Tracta le 2 juin 1956, avant de revenir le 16 juin pour les finitions. La facture fut éditée le 25 octobre 1956 et la voiture livrée à la même période.
Commandée par Albert Dewandre (celui des servo-freins, également administrateur de la société belge FN) qui jugeait un cabriolet beaucoup trop "jeune" pour un homme de son âge, comme le souligne Marc-Antoine Colin dans son ouvrage "Grégoire, une aventure Hotchkiss". Chapron a donc ajouté un pavillon qui transformait le cabriolet en un élégant coupé. Il s'est vu attribuer le numéro de série 507, qui était celui d'une Hotchkiss-Grégoire achetée neuve le 2 août 1951 par Albert Dewandre.
Il est amusant de noter que ce coupé est parfois présenté, à tort, comme "la voiture de Françoise Sagan", car la célèbre écrivaine apparaît sur une série de photos en compagnie de la voiture. En fait, elle s'est simplement contentée de poser un jour avec: en plus d'apprécier les voitures de sport, elle était la fille de l'ingénieur P. Quoirez, ami de JA Grégoire.
Ce coupé a été acheté en novembre 1973 par Pierre Héron à Roger Fallon, en Belgique, pour la somme de 14 300 francs français (comme le précise une attestation faisant partie du dossier). Notre collectionneur est rentré chez lui par la route, en s'étonnant de la consommation élevée due au compresseur et qui lui a fait croire à une fuite de carburant ! Plus récemment, du 10 décembre 2021 au 28 mars 2022, cette voiture a été prêtée au musée de Compiègne pour son exposition sur le thème de la vitesse.
Cet unique coupé Tracta-Grégoire se présente dans un état d'origine exceptionnel, avec une peinture de deux tons de gris d'origine, rehaussée de filets verts en rappel de la sellerie. L'équipement est parfaitement complet (baguettes, badges, enjoliveurs, éclairage...) et la mécanique est entièrement d'origine avec son compresseur Constantin relié à un carburateur Solex. L'intérieur est magnifique, d'une finition impeccable digne des grands carrossiers, avec une sellerie vert sombre bien préservée et un tableau de bord sans défaut, de présentation sportive avec ses cadrans ronds et son beau volant bois. La carrosserie porte bien entendu le badge "Henri Chapron".
Ce modèle représente donc l'opportunité exceptionnelle d'acquérir un modèle traduisant les idées modernes de son concepteur, sous une robe élégante signée d'un dessinateur talentueux, dans un état d'origine rare et parfaitement authentique. Cette pièce unique ouvrira à son propriétaire les portes des évènements historiques les plus enviés.
Unregistered
Chassis no. 1011 / 507
Engine No. S12
- A one-off
- In exceptionally original condition
- Fantastic story
- Supercharged engine
The adventure of the Hotchkiss-Grégoire, which came to an end before even having reached 250 units, did not discourage the car's designer and engineer Jean-Albert Grégoire. In January 1955, he brought together the directors of the Automobiles Tracta company, created in 1927 with his friend Pierre Fenaille to exploit the patents for the homokinetic joint for front-wheel drive, and offered them a sports car project! JA Grégoire absolutely wanted to prove the soundness of his technical solutions and took up the principles adopted for the Hotchkiss-Grégoire, whilst improving upon them. The new car thus had a cast alloy structure, light and rigid but easier to manufacture than the saloon, and it took up the variable flexibility suspension, which was a satisfying solution. The brakes were discs on the front wheels (a first in France for a passenger car), with a Dewandre servo, but the flat 4-cylinder engine of the sedan did not have enough power for a machine that wanted to compete with the Jaguar XK or the Lancia Aurelia. In his book "Toutes mes automobiles", JA Grégoire recounts: "One of my customers at Hotchkiss-Grégoire had fitted a Constantin compressor on his engine (...). He suggested that I try his machine. I was amazed by the result, the already responsive and quick car was dramatically better, both in terms of acceleration as well as top speed, which reached 170 km/h." This is what encouraged Grégoire to adopt the same solution for his car. Thus, thanks to the Constantin compressor, the power increased from 75 to 125bhp at 4,500 rpm.
Next step was to give it an appropriate body. "I wasn't trying to give this machine an aerodynamic shape," continues JA Grégoire. "After the disappointing experience of the Hotchkiss-Grégoire, I no longer wanted to hear about Cx, models and wind tunnels." It was one of the rare times when the engineer put aside mechanicals in favor of aesthetics. Even if top speed would suffer, the charm of the car was more important.
Grégoire therefore called on two designers: Mario Boano in Italy and Carlo Delaisse in France. The drawings of the first were probably too extravagant, and so Grégoire opted for the sober elegance of Delaisse's design, which did not suffer too much from a long front overhang. The making of the bodywork was entrusted to Chapron, who still worked as per traditional methods, of high quality, but very labour-intensive.
The prototype was unveiled as a world premiere during an "International Sports Car Show" organized at the Ford Museum in Dearborn. It was then presented in France and garnered praise from the press for its elegance, with journalists waiting for the project to turn into series production. In January 1956, four bodies were ordered by Tracta from Henri Chapron, but the car quickly ran into the same problem as the Hotchkiss-Grégoire: its high cost price, largely due to the artisanal bodywork. The 3,500,000 francs asked for must be compared to the 2,950,000 francs for a Facel Vega, with the much more powerful V8, or the 2,250,000 francs for a Jaguar XK 140, was just too much. Then the issues with Hotchkiss did not help matters either, depriving Grégoire of a distribution and maintenance network. Added to this were supply and manufacturing difficulties, and thus the project was nipped in the bud. At the end, only the first four cars ordered were made.
The car we offer here is one of four made, but it has the particularity of being the only coupé. Noëlle Chapron, from whom the complete file of this example, including paint and leather samples, can be obtained, confirmed that the order had been placed on January 10, 1956, and the car was then delivered to Tracta on June 2, 1956, before returning on June 16 for the finishing touches. The final invoice was made on October 25, 1956, and the car delivered at the same time.
Ordered by Albert Dewandre (the one of the servo-brakes, also director of the Belgian company FN) who considered a cabriolet far too "young" for a man of his age, as Marc-Antoine Colin points out in his book "Grégoire, une aventure Hotchkiss". Chapron added a roof which transformed the convertible into an elegant coupe. It was assigned the serial number 507, which was that of a Hotchkiss-Grégoire purchased new on August 2, 1951, by Albert Dewandre.
It is amusing to note that this coupe is sometimes presented, wrongly, as "the car of Françoise Sagan", because the famous writer appears in a series of photos with the car. In fact, she simply posed one day with it: other than appreciating sports cars, she was the daughter of the engineer P. Quoirez, a friend of JA Grégoire.
This coupé was purchased in November 1973 by Pierre Héron from Roger Fallon, in Belgium, for the sum of 14,300 French francs (as specified in a certificate in the file). Our collector returned home by road, surprised by the high consumption due to the compressor and which made him believe in a fuel leak! More recently, from December 10, 2021, to March 28, 2022, this car was lent to the Compiègne museum for its exhibition on the theme of speed.
This unique Tracta-Grégoire coupé is in exceptional original condition, with original two-tone grey paint, enhanced with green stripes as a reminder of the upholstery. The equipment is perfectly complete (trims, badges, hubcaps, lighting...) and the mechanicals are entirely original with its Constantin compressor connected to a Solex carburettor. The interior is magnificent, with an impeccable finish worthy of the great coachbuilders, with well-preserved dark green upholstery and a faultless dashboard, sporty in appearance with its round dials and beautiful wooden steering wheel. The body naturally bears the "Henri Chapron" badge.
This model therefore represents the exceptional opportunity to acquire a model reflecting the modern ideas of its designer, under an elegant dress signed by a talented designer, in a rare and perfectly authentic original condition. This unique piece will open to its owner the doors of the most coveted historic events.
Photos © Mathieu Bonnevie