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Homme de théâtre et de divertissement, dessinateur, créateur de jardins, Carmontelle inventa en 1783 un nouveau moyen d'amuser la société de son entourage, le transparent. Tendu entre deux bobines et éclairé par transparence, un rouleau peint défilait devant les yeux des spectateurs en leur donnant l'impression de se mouvoir à travers un charmant paysage. Les scènes représentées sont bien souvent analogues à celles de ses fameux proverbes, sortes de petites comédies improvisées, comme le remarquaient Portalis et Beraldi : " Carmontelle n'avait pas de plus grand plaisir, a-t-on dit, que de mettre ses proverbes en transparents et ses transparents en proverbes1 ". Dans la veine de Robertson, inventeur dans les années 1790 des 'Fantasmagories' où il mêlait lanterne magique, illusion et musique, Carmontelle réunit théâtre, musique et image animée dans une composition éphémère, nouvelle sorte de spectacle adaptable à des publics différents, transportable et maniable par une seule personne.
Si tous les personnages d'une société revivent dans ses portraits dessinés, c'est donc toute une société qui se ranime dans ses transparents, avec le décor dans lequel ils vécurent. Dans son article consacré aux transparents de Carmontelle2, Pierre Francastel souligne l'importance de l'œuvre de l'artiste : " Considérée dans son ensemble, son œuvre, qui du seul point de vue littéraire ne dépasse pas le second rang, devient l'une des plus vivantes et des plus complètes qui soient. C'est au premier rang des mémorialistes et chroniqueurs du siècle qu'il faut le placer, comme l'un de ceux qui nous ont donné le plus fidèle spectacle de leur temps ".
1. 'Les graveurs du XVIIIe siècle', Paris, 1880, t.I, p. 294.
2. P. Francastel, " Les transparents de Carmontelle ", in 'L'Illustration', 17 août 1929, p.159.