Originaire de Calabre, Mattia Preti se forme à Rome dans les années 1630. Il fait la synthèse de deux courants antagonistes, recueillant l'héritage du Caravage et de ses suiveurs, d'une part, et adoptant la technique plus libre des artistes néo-vénitiens, Pier Francesco Mola, Pietro Testa ou le jeune Nicolas Poussin, d'autre part. Auteur de grands cycles à fresques à Rome (Sant' Andrea della Valle), à Modène (San Biagio), il voyage à Venise vers 1645. Durant ces séjours, il assimile et réinterprète l'exemple de ses prédécesseurs, Guerchin, Reni, Rubens, Lanfranco, Véronèse. Au cours des sept années qu'il passe à Naples, de 1653 à 1660, il transforme profondément la tradition de cette ville. Une heureuse émulation réciproque avec Luca Giordano régénère le style des deux artistes. Puis, Preti s'établit pour les quarante dernières années de sa vie à Malte, où il décore la cathédrale Saint-Jean de la Valette et continue à peindre de nombreux retables ou des tableaux de galerie pour des amateurs, tant pour la demande locale qu'à l'exportation vers le continent.

Le thème du retour du fils prodigue revient régulièrement dans son œuvre, à travers une dizaine de compositions très différentes. Dans la première partie de sa carrière, Mattia Preti a élaboré de grands formats avec de nombreux personnages en pied sur ce sujet (Le Mans, Musée de Tessé ; Naples, Musée de Capodimonte ; Reggio Calabria, Musée), puis il a réalisé des tableaux avec un nombre limité de figures à mi-corps, retournant au cadrage et à l'exemple direct, profondément humain, du Caravage. Il n'y a que quatre protagonistes dans la version conservée dans une collection privée (Milan, Compagnia di Belle Arti en 1994), et seulement trois dans celle probablement commandée par le cavalier Silvio Sortino de Palerme au début des années 1680 (vente anonyme, Venise, Semenzato, 22 février 1998, n° 156).
Notre tableau constitue la plus dépouillée de toutes, se concentrant sur les seuls pères et fils, le geste d'accueil du premier et de prière du second. Vus di sotto in su, ils émergent de l'ombre par un puissant clair-obscur, autour du mouvement construit par les mains et le manteau du vieillard. La matière picturale onctueuse, l'accord coloré orange-noir-blanc, sans le rouge vif que Preti affectionne par la suite, sont autant d'éléments qui incitent à dater notre toile des années 1650.
Nous connaissons une copie de notre composition, attribuée à Mattia Preti et à son atelier (toile, 129 x 101 cm, ayant figuré à la vente anonyme, Rome, Finarte, 20 novembre 1990, n° 168).

Nous remercions le Professeur Nicola Spinosa qui, après examen direct du tableau, en a confirmé l'authenticité.