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Jean-Baptiste GREUZE (Paris, 1725 - Tournus, 1805)
Jeune Fille pensive (La liseuse)
Estimate:
€200,000 - 250,000

Complete Description

Jeune Fille pensive (La liseuse)
Toile

'La liseuse', canvas, by J.-B. Greuze

18.50 x 15.35 in.

39 cm x 47 cm
Provenance:

Collection James de Rothschild (d'après Mauclair 1906) ;

Collection Gustave de Rothschild (1829-1911) ;

Vente de la succession de Madame B. (provenant des anciennes collections Gustave et Robert de Rothschild) ; Paris, Piasa, Drouot Montaigne, 13 juin 1997, n° 73 (comme “attribué à Greuze” dans le catalogue papier, mais vendu comme par Greuze, dimensions données avec le cadre 57 x 49cm ; donné à tort comme le Mauclair, n° 681) ;

Collection particulière, Belgique

Exhibitions:

De Watteau à Prud'hon. Exposition organisée au profit de la Ligue nationale contre le taudis et de l'Entr'aide sociale batelière, Paris, Galerie Wildenstein, du 11 au 31 mai 1956, Gazette des Beaux-Arts, p. 18, n° 47 (Jeune fille accoudée, dimension donnée avec le cadre 60 x 50cm)

Greuze l’enfance et la famille, Paris, galerie Eric Coatalem, du 6 novembre au 20 décembre 2024, catalogue par Antoine Chatelain, p.151, n° 53, reproduit p.131

Bibliography:

Camille Mauclair, Jean-Baptiste Greuze (catalogue raisonné rédigé par Charles Masson et Jean Martin), Paris, 1906, édition H.Piazza, p.52, n° 779 (avec erreurs de dimensions, 40 x 37 cm, comme pendant de la Méditation, Mauclair, p.45, n°680, mais la largeur de ce "pendant" est beaucoup plus réduite, 40 x 31 cm)

Comment:

Au cours de sa carrière, Greuze a multiplié les représentations d'enfants et de jeunes gens à mi-corps, qui sont pour lui autant de prétextes à explorer son thème de prédilection : l’âme et la psychologie de ses modèles. Ici, il réussit à capter avec subtilité le passage vers l’adolescence. Dans la suite de la tradition hollandaise [1], il synthétise le portrait, la "tête d'expression" avec la peinture de genre, ajoutant sa sympathie caractéristique dans l'observation des visages. Dans ses premiers tableaux,Greuze les montrait de face, mais il ajoute, par la suite, un élément qui donne de la profondeur. Ici, dans l’angle inférieur droit, il creuse l’espace par un coin de bureau en poirier noirci, avec un tiroir entre-ouvert d'où sort un porte-crayon à sanguine et sur lequel est posé un livre en perspective. Le cadrage resserré crée une proximité et un dialogue intime avec le spectateur, et son métier rend avec justesse la carnation et la malléabilité de la chair. Nous datons notre toile après 1780.

Les philosophes du siècle des Lumières accordent beaucoup d’importance à l’éducation, et notamment Jean-Jacques Rousseau qui publie Émile, son traité sur ce sujet en 1762. Il a été précédé des Pensées de John Locke à la fin du XVIIe siècle, et suivi des romans d’apprentissage comme Adèle et Théodore de Madame de Genlis (1781). L’intérêt pour les portraits d’enfants captive les peintres, mais aussi les sculpteurs comme Falconet, Pajou ou Houdon dans leurs bustes en terre cuite.

En peinture, Chardin ou Lépicié montrent souvent des écoliers studieux, alors que Greuze capture un moment d’inattention après la lecture, saisissant le modèle en train de rêvasser[2].Dans l’abandon de notre jeune fille, la chemise légèrement entrouverte apporte une touche de sensualité à la figure[3].Diderot a été l’un des premiers à déceler et à décrire cette ambiguïté dans son œuvre : « Tout cela respire l’innocence, et pourtant … Ne sentez-vous pas, en même temps, une chaleur secrète, une flamme qui commence à s’éveiller ? Greuze a le talent singulier de peindre la pudeur en y mêlant une lueur de sensualité, si douce, si voilée, qu’on ne sait plus si l’on doit admirer ou désirer. »[4].

 

1] Rembrandt van Rijn, Titus à son bureau, 1655, Rotterdam, musée Boijmans Van Beuningen.

[2] Greuze avait même exposé au Salon de 1755 Un enfant qui s’est endormi sur son livre (Le Petit Paresseux, Montpellier, musée Fabre). En 1800, le Portrait de Benoît-Agnès Trioson par Girodet (musée du Louvre) décrit l’enfant totalement distrait de son étude.

[3] Elément qu’on trouve sur plusieurs de ses figures à mi-corps, comme Réverie (collection particulière), la Volupté (idem), Jeune fille écoutant (Londres, Wallace collection) …

[4] Diderot, Salon de 1765, à propos de la jeune fille dans L’Accordée de village (Louvre).

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