Charles Spargue Pearce entre, au même titre que le célèbre John Singer Sargent, dans la catégorie de ces peintres américains installés en Europe et éduqués artistiquement par les académiques français de la seconde moitié du XIXe siècle. Notre artiste, tout comme son glorieux compatriote, fut l'élève de Léon Bonnat dès 1873 et se construit une solide réputation au gré des Salons parisiens et des médailles qu'il y récolte.
Encrant habituellement son art dans une manière résolument académique, pratiquant avec autant d'aisance le portrait ou la scène orientaliste, Charles Spargue Pearce nous livre ici une toile empreinte du symbolisme naissant et de cette nouvelle modernité qui l'inspire, témoignant des largesses de sa palette et des métamorphoses imposées à sa créativité.
Dans cette œuvre, il propose une représentation moderne du passage du Styx, fleuve séparant le monde terrestre des enfers, tirant profit d'un clair-obscur aussi radical qu'audacieux, comme pour mieux opposer les figures du premier plan symboles de la vie, à Charon dans sa barque s'enfonçant dans l'obscurité, emportant le cadavre enveloppé d'un homme s'apprêtant à rejoindre l'éternelle noirceur de la mort.