1/ Manuscrit, 2 p. in-4, papier vergé filigrané " Impérial Treasury de La Rue ". Très beau texte, qui semble être une esquisse d'un texte sur l'art. Ecriture très lisible.
" Sorti dans la vie, le fleuve de la vie, l'air, le soleil, le sentiment de l'Etre, au débordement. L'art d'extrême orient nous apparaît ainsi.
Cette ombre va de proche en proche, travailler le chef-d'œuvre, lui donner ce qui charme la morbidesse profonde.
Tout à côté, c'est le champ des baisers, non ce qui n'est pas matériel car les choses se pénètrent. Le torse s'élève en gobelet allongé au milieu des pétales, du culot, l'accompagne en passant en haut, au bord de la fleur, du vase grâce aux anses.
Ces quelques grands plans qui enferment la forme et le sujet cette syntaxe prend la grandeur même comme sujet avant sujet.
Il y a quelque chose de tendre qui a disparu. La tête géométrique parfaite, égalisant les deux yeux a l'intelligence.
Torse au fond reculé, plus précieux, plus inoubliable, plus immobile dans l'éloignement, dans l'obscur de l'obscène.
Ici le génie antique d'architecture dort. Là, sa volupté l'a déshabillée, au milieu le manteau et ses plis ouverts, Nirvana.
Il y a dans la femme toujours une vierge, au sens de la beauté, […], du beau.
C'est une merveille que la forme sphérique, seule forme incomparable dans ses dispositions productrices de chefs-d'œuvre.
Aujourd'hui, c'est immobile [?] de beauté, dans le bronze. L'imperceptible mouvement de la lumière. L'on sent les muscles immobiles, tous en faisceaux prêts à surgir "
2/ Lettres à Gustave Coquiot, 1911-1919.
Gustave Coquiot (1865-1926) fut l'un des secrétaires de Rodin. Ecrivain et critique d'art, il écrivit notamment sur Rodin " Le Vrai Rodin " (1913) et " Rodin à l'Hôtel de Biron et à Meudon " (1917).
34 lettres au total : 10 l.a.s. de Rodin (8 p. in-12 ; 5 enveloppes sont de la main de Rodin), 17 l.s. de Rodin, 15 l. de secrétaires (notamment Mario Meunier, son secrétaire, 1910-1912), 2 cartes de visites écrites des secrétaires,
Rodin fixe rendez-vous au " cher Monsieur Coquiot ", notamment pour lui donner un dessin qui illustrera un de ses articles (25 mars 1911) ou, avec un photographe, pour photographier l'Hôtel Biron. Au sujet de l'Hôtel Biron, que Rodin occupe depuis 1908 et dont l'Etat veut se porte acquéreur en 1911 pour y installer des services ministériels : " Le transfert du Ministère de la Justice est chose bien décidée et ils ne me laissent ici que jusqu'au 15 janvier 1912 comme tout le monde. " (3 oct. 1911) ; plus tard, il confirme devoir abandonner l'Hôtel le premier janvier 1912. De Roquebrune où il séjourne, Rodin souhaite aller voir Renoir à Cagne et en demande son adresse. " J'ai écrit à M. Bernheim que je ne puis faire le buste de Renoir ", écrit-il en février 1914, " Le buste se fera, mais plus tard ".
Rodin prend des nouvelles de la pièce que Coquiot fait jouer, le remercie pour les photographies qu'il lui envoie de ses voyages : " Je vois que vous faites un charmant voyage et que passez par des émotions divines. Je vous remercie de m'envoyer de ces photos qui m'y font participer " (24 août 1913). Rodin remercie aussi le Prince Poniatowski de lui avoir prêté des photographies pour l'étude qu'il a faite. Une grippe l'accable, à cause d'un courant d'air lors de l'inauguration de son exposition à l'Ecole de médecine ; l'exposition est très belle, et Coquiot pourrait s'y rendre pour la décrire (18 mars 1918). Il prépare un entretien avec la journaliste Judith Cladel. Le Maître réclame la préface que Coquiot doit écrire pour l'extrême Orient et qui " souffre d'attendre ". Coquiot lui ayant fait savoir que deux anges en bois sculpté sont à vendre, il le prie de venir les lui montrer, bien qu'il " n'achète pas beaucoup de ces choses ".
" Les Bronzes que j'ai doivent rester au Musée. Et je ne peux faire que de nouvelles fontes. Pour cherches ces modèles, c'est une peine très grande et qui demandera beaucoup de temps " (8 juill. 1914).
- 1 photographie : Rodin devant un plâtre.