Dessin original. Encre de Chine, plume et lavis, 29 x 21 cm, 2 taches brunes dans les angles inférieurs, encadrement sous verre.

Disposant deux compositions en regard, Genet a dessiné à gauche deux représentations animalières, un profil d'oiseau et une silhouette de canard ou d'oie, et à droite trois profils masculins superposés.

Avec un humour brutal, Genet installe un étrange jeu de miroir rappelant les planches de Lavater, dans lequel la physionomie animale est marquée par un net anthropomorphisme (rictus, plumes en coiffure relevée) alors qu'à l'inverse les traits humains dénotent un certain zoomorphisme (œil ophidien, regard vif dans une tête impassible)...

" Un pauvre oiseau qui meurt et le goût de la cendre,
Le souvenir d'un œil endormi sur le mur,
Et ce poing douloureux qui menace l'azur
Font au creux de ma main ton visage descendre.

Ce visage plus dur et plus léger qu'un masque
Est plus lourd à ma main qu'aux doigts du receleur
Le joyau qu'il empoche. "
(Jean Genet, Le Condamné à mort, 1951)

Dessins de forçats. Genet a laissé quelques dessins, stéréotypes des dessins de forçats, empruntant souvent au vocabulaire des formes de l'Afrique pour s'exprimer contre l'Occident. Il s'y fait jour un art marqué par l'usage insolent des conventions à travers des parodies, des détournements, des confrontations de personnages n'étant que les simulacres les uns des autres.
Plusieurs textes de Genet dénotent par ailleurs une sensibilité picturale, comme ses articles L'Atelier d'Alberto Giacometti (1957), " Le Secret de Rembrandt " (1958) ou " Ce qui est resté d'un Rembrandt déchiré en petits carrés bien réguliers, et foutu aux chiottes " (1967).

Bibliographie
- FLAHUTEZ (Fabrice). " Jean Genet dessinateur ", dans Toutes les images du langage : Jean Genet, Schena Editore, Alain Baudry & Cie, 2008.
- DESSINS D'ECRIVAINS. Paris, Éditions du Chêne, 2003. Reproduction p. 136.