Comment:
Au registre principal de la face l'artiste a représenté la Vierge assise sur un banc de nuages tenant l'Enfant entièrement nu dans ses bras ; le groupe se détache sur le fond d'or et prend place sous une arcade polylobée ; au pinacle l'oiseau prenant son envol apparaît sous une arcade polylobée.
Au revers, saint Fabien (évêque puis pape en 250) portant les insignes épiscopaux regarde saint Sébastien attaché à un arbre le corps percé de flèches. Au registre supérieur, émergeant d'un nuage, Dieu le Père contemple la scène.
Saint Sébastien - associé ici à saint Fabien dont on célébrait la fête le même jour - était invoqué contre la peste. Ce panneau, inédit jusqu'ici, dut sans doute voir le jour lors d'une épidémie locale. De nombreuses confréries ombriennes ont fait réaliser ce type de panneau que l'on sortait lors de processions pour conjurer les effets des catastrophes. Niccolo Alunno (actif en Ombrie et dans les Marches à la fin du XVe siècle), en donna sans doute le modèle aux peintres de cette région où l'on trouve de multiples exemples similaires dont le répertoire ornemental de la menuiserie avec pinacle en accolade trouve également un écho dans la partie méridionale de l'Ombrie (Cf. F.Todini, 'Niccolo Alunno e la sua Bottega', Pérouse 2004)
Cependant le style de l'auteur anonyme de ce panneau semble s'éloigner de celui de Niccolo Alunno, plus âpre et plus nerveux, pour se rapprocher plus vraisemblablement de celui de Pier Matteo d'Amelia (documenté de 1467 à 1502 ex Maître de l'Annonciation Gardner).
Sans doute le Saint Augustin de ce dernier artiste, panneau du retable de 1481 (autrefois à Cornbury Park, Oxforshire) a-t-il pu influencer le peintre de notre panneau lorsqu'il eut à décrire la disposition de la chape de lampas de soie bordée d'un large orfroi de son saint Fabien; de même Dieu le père, de Piermatteo d'Amelia, vieillard barbu à la tête chenue et bouclée apparaissant dans un oculus au-dessus de la Madone dans l'église Sant'Agostino de Narni datée vers 1483 et dont la robe bouffe au-dessus de la ceinture, semble avoir servi de modèle ici pour son alter ego (cf. F Todini, 'La Pittura umbra dal Duecento al primo Cinquecento', Milan, 1989, p.284-285, fig.1072, 1084 et F. Zeri, " Piermatteo d'Amelia e gli Umbri a Roma ", in 'Dall'Albornoz all'età dei Borgia', Convegno di Studi, Amelia 1-3 Octobre 1987, p.17-40). Quant au saint Sébastien, petit athlète musclé, il trouve ses correspondants dans les multiples représentations qui ornaient fresques et retables ombriens à la fin du XVe siècle. Au recto, La Madone et l'Enfant reprend une disposition chère à Pinturicchio telle celle de la Vierge du retable de Pérouse pour Santa Maria dei Fossi en 1495 (Pérouse, Galleria Nazionale dell'Umbria, n°274).
Ainsi sommes-nous en présence de l'un des nombreux artistes ombriens au style éclectique qui travaillaient à l'extrême fin du XVe siècle au sud de la région pour satisfaire les besoins d'une population anxieuse et terrifiée devant les ravages de la peste et que les fréquentes processions où l'on exhibait ces saints protecteurs devaient apaiser.
South Umbrian school, late 15th century
Recto: la Vierge à l'Enfant ; au-dessus la colombe du saint Esprit ; verso : Saint Fabien et Saint Sébastien en pied ; au-dessus Dieu le Père
Double face procession, paint and gold ground on wooden panel in original sculptured gilt frame
84 x 41cm (33,1 x 16,1 in.) with frame without pinnacles
(Restorations and accident on one pinnacle)