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Eugène DELACROIX Charenton-Saint-Maurice, 1796 - Paris, 1863
Feuilles d'études et têtes de lionnes
Estimation:
€50,000 - €70,000
Sold :
€136,850

Lot details

Feuilles d'études et têtes de lionnes
Crayon noir

Cachet de l'atelier en bas à droite (L.838a)

Provenance:

Ancienne collection Dieterle;
Ancienne collection du baron Vitta;
puis par descendance

Exhibitions:

"Eugène Delacroix", 1930, Nice, musée Jules Chéret, n°25
"Centenaire du Romantisme, Exposition Eugène Delacroix", Musée du Louvre, juin-juillet 1930, n°624

Bibliography:

" L'œuvre complet de Eugène Delacroix ", Robaut, Charavay frères éditeurs, Paris, 1885 (sans doute partie du n°1845 ou 1846 ou 1856 ou 1858)

Comment:
Œuvre en rapport :
Une feuille d'études à la plume et encre brune, reprend les mêmes têtes de lionnes que notre dessin dans un ordre différent (conservée au musée du Louvre, inv. RF 23316)

Le 19 juin 1829, dans les chaleurs suffocantes du début de l'été parisien, une lionne meurt au Jardin des Plantes. Aussitôt prévenu, Delacroix écrit un mot à Barye, avec qui il étudie les animaux de la Ménagerie. " Le lion est mort, au galop ! ".
Il faut effectivement se mettre immédiatement au travail, avant que le cadavre ne se décompose. C'est ainsi que Delacroix put à loisir et sans risque étudier de près la morphologie des fauves qui le fascinaient. La position des têtes sur la feuille induit qu'il fait tourner cette dernière avec la main gauche, tandis qu'il enchaîne félinement les études de têtes. Le médium du crayon noir incline à penser que notre dessin fut exécuté sur place. Le dessin du Louvre à la plume et encre brune en serait la reprise, d'après notre feuille, de retour à son atelier ( voir M. Sérullaz, " Inventaire des dessins d'Eugène Delacroix, Musée du Louvre, Cabinet des Dessins, éd. RMN, Paris, 1984, t. I, n°1062 repr.). Le dessin du Louvre, sur lequel figure une étude de tête se rapportant un portrait exécuté vers 1829, confirmerait une datation similaire pour les deux feuilles.

" D'où vient le mouvement que la vue de tout cela a produit chez moi ", écrit Delacroix dans son Journal en 1847. S'il est fasciné par le roi des animaux, c'est que Delacroix retrouve dans sa sauvagerie instinctive, égoïste et sanguinaire, celle qu'il sent monter du fond des entrailles humaines. En grand fauve des arts qui se repaît des artistes qui l'ont précédé sur cette voie, comme Rubens et Rembrandt, en opportuniste qui se saisit du moindre éclair de lumière ou de la moindre attitude de ses modèles, humain ou animalier, en ultime dépositaire d'un savoir transmis à travers les siècles, aussi noble dans son isolement génial que le solitaire des savanes, Delacroix explore les replis des fauves comme ceux de son âme.

Dans un remarquable et magnifique ouvrage, " Le bestiaire d'Eugène Delacroix ", A. Sérullaz et E. Vignot ont exhumé le texte d'une conférence d'Hyppolite Taine sur Léonard de Vinci où le professeur d'histoire de l'art rapporte la réflexion que l'étude des fauves au Jardin des Plantes avait inspiré Delacroix : " Selon lui, il y a ainsi, dans toutes les formes humaines, des formes animales plus ou moins vagues qu'il s'agit de démêler, et il ajoutait qu'en poursuivant l'étude de ses analogies entre les animaux et l'homme, on arrive à découvrir dans celui-ci les instincts plus ou moins vagues par lesquels sa nature intime le rapproche de tel ou tel animal " (opus cité supra, éd. Citadelles et Mazenod, 2008, p. 101).


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