Fin XVIIIe siècle
Boîtier rond sur charnière, décoré au dos d'un émail orange translucide sur guillochage avec rosace de diamants et points d'émail blanc ressemblant à des perles graduées, lunette sertie de diamants, déclenchement de la sonnerie au pendant avec correcteur sur la carrure pour la fonction du mécanisme « à toc »
Châtelaine en or formée de deux médaillons ovales décorés de pastilles émaillées rouge et blanc, intercalées par un serti de demi-perles, le pourtour également serti de demi-perles, la spatule au dos poinçonnée du poinçon de maître "M&P"
Cadran émail blanc avec chiffres romains pour les heures, serti de diamants pour la division des demi-heures, chiffres arabes des cinq minutes, aiguilles stylisées serties de diamants, ouverture pour le carré de remontage, minuterie chemin de fer, signé « LÉpine à Paris, Hger du Roy à Paris »
Mouvement mécanique avec remontage à clef, platine pleine en laiton doré signé, fusée et chaîne avec force de maintien de type Harrison, échappement à verge, balancier spiral à trois bras, coq continental percé et gravé, système de répétition de type Le Roy, répétition sur cloche en appuyant sur le pendant, signature su la platine « LÉpine à Paris, Hger du Roy à Paris »
Diam. 39 mm
Long. 19 cm
Poids brut. 110 g
Jean-Antoine Lépine (1720 – 1814)
Jean-Antoine Lépine fils de Jean «Le Mécanicien du Roi», est né le 18 novembre 1720 à Challex, petit village à quelques kilomètres à l’ouest de Genève. Après avoir travaillé quelque temps chez Decrose, au Grand Saconnex, dans la banlieue de Genève, il arrive à Paris en 1744.
Les débuts auprès de la famille d’André-Charles Caron
Ouvrier d’André Charles Caron, horloger du roi et père du célèbre écrivain Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais, il épouse la fille de ce dernier en 1756 et est reçu maître en 1765. Il est nommé horloger du roi vers 1765.
En 1766, il succède à Caron, et figure sur la liste des horlogers parisiens de cette année-là sous le nom de Jean-Antoine Lépine, horloger du Roy, rue Saint-Denis, place Saint-Eustache. En 1772, Lépine s’établit place Dauphine ; en 1778-1779, quai de l’Horloge du Palais ; puis rue des Fossés Saint- Germain-l’Auxerrois près du Louvre en 1781 ; et enfin au 12, place des Victoires en 1789.
En 1782, sa fille Pauline épouse un de ses ouvriers, Claude-Pierre Raguet, avec qui il s’associe à partir de 1792 et qui travaillera sur nombreuses de ses réalisations et notamment une série de pendules exceptionnelles. En 1763, il invente un nouveau mécanisme de répétition pour montres, qui sera publié dans les Mémoires de l’Académie des Sciences en 1766.
L’invention d’un nouveau type de mouvement dit
« calibre Lépine»
En 1763, Lépine avait inventé un nouveau mécanisme de répétition pour montres qui fut publié
en 1766. Son nouveau calibre inventé vers 1770 était un concept révolutionnaire remplaçant la platine arrière par des ponts.
Connu sous le nom de « calibre Lépine », son but était de permettre aux différentes pièces du mouvement d'être retirées séparément pour la réparation et l'entretien.
Son nouveau calibre, de conception révolutionnaire, remplaçant la platine arrière par des ponts, est inventé vers 1770. Les différentes pièces mobiles peuvent désormais être démontées séparément, ce qui facilite grandement l'entretien et la réparation.
Ce nouveau dispositif est amélioré par la suite par Abraham-Louis Breguet, qui l'adopte à partir de 1790 pour la plupart de ses montres.
Les innovations techniques et esthétiques
Lépine est également à l'origine de plusieurs autres inventions, dont l'échappement à virgule, une simplification de l'échappement à double virgule, inventé par son beau-père et utilisé par son beau-frère, Pierre Augustin Caron (qui devint célèbre sous le nom de Beaumarchais).
Concurrent de l'échappement à cylindre inventé en Angleterre, l'échappement à virgule connaît un certain succès sur le continent à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle, où il est utilisé par de nombreux horlogers. Il présente cependant l'inconvénient de ne pas contenir d'huile, et s'use rapidement lorsqu'il n'est pas parfaitement exécuté.
Lépine met également au point une nouvelle forme de boîtier, à charnières perdues, et à lunette fixe. Comme ces montres se remontent et se règlent par l'arrière, le mouvement est protégé de la poussière par un boîtier intérieur. Cette nouvelle disposition présente l'avantage d'empêcher l'accès par le cadran, évitant ainsi de l'endommager ou d'endommager les aiguilles.
D'autres inventions de Lépine n'eurent qu'un succès éphémère, ne justifiant ni la difficulté de leur réalisation, ni l'augmentation de leur prix. Il en fut ainsi des roues à dents de loup, destinées à limiter les frottements, et d'un procédé de remontage sans clef, actionné par pompage de la tige.
Le retour dans la ville de Ferney près de Genève
Lépine resta fidèle à son pays d'origine et se rendit souvent dans la campagne de Gex, notamment à Ferney, où Voltaire avait installé une manufacture de montres en 1770, sans doute aussi pour son ego afin de mettre en avant l’horloger qui était aussi un point fort de la famille de Jean-Jacques Rousseau, autre philosophe de la fin du Siècle des Lumières. Des relations amicales s'établirent entre Lépine et le philosophe, mais on ne connaît pas le rôle exact qu'il joua dans la manufacture de Ferney.
Un mémoire non signé de 1784 rapporte que Lépine séjourna 18 mois à Ferney et qu'il y fit fabriquer des mouvements de montres. Après sa retraite, vers 1793, et bien qu'il ait perdu la vue, Lépine continua à être actif dans la firme dirigée par son gendre Claude-Pierre Raguet, et ce jusqu'à sa mort. Lépine resta actif dans l'entreprise jusqu'à sa mort à l'âge avancé de 93 ans, le 31 mai 1814.
Notre montre accompagnée de sa châtelaine signée par l’un des plus grands horlogers en France à la fin du XVIIIe siècle est un témoignage de l’art horloger en France à la fin du Siècle des Lumières. Un exemple de châtelaine par cet horloger issue de la même période est mentionné et illustré dans le Dictionnaire des Horlogers Français, p. 387, Tardy, provenant de la vente de la célèbre collection Jubinal de Saint-Albin, Me Etienne Ader, le 1er avril 1938 à l’Hôtel Drouot.