Sur ses conditions de détention, et évocation pessimiste de sa carrière après la guerre.
1er septembre. « Je n’ai pas besoin de vous dire que pour moi il ne se passe rien… Je suis un enterré vivant. Lisant l’autre jour dans quelque journal le qualificatif de “revenants” appliqué à des prisonniers rentrés en France, je l’ai trouvé lamentablement juste. […] Vous me proposez de m’envoyer des livres ! Hélas ! Je voudrais que vous sachiez, car le savez-vous ? dans quelles conditions matérielles je suis ici pour travailler, et n’ai jamais cessé d’être. Du reste, quand bien même ces conditions seraient radicalement différentes ! Travailler à quoi ? Travailler pour quoi ?… Pour travailler, il faut avoir un but. Or quel but puis-je avoir ? Ma carrière, me direz-vous ? Mais, si je ne peux combattre à nouveau d’ici la fin de la guerre, resterai-je dans l’armée ? et quel avenir médiocre m’y sera fait ? 3 ans, 4 ans de guerre auxquels je n’aurai pas assisté, davantage peut-être ! Pour avoir quelque avenir dans la carrière, en ce qui concerne les officiers de mon âge et qui ont quelque ambition, la première, l’indispensable condition sera d’avoir fait la campagne, d’avoir, au fur et à mesure qu’elle changeait de forme, appris à la juger, formé ses raisonnements, trempé son caractère et son autorité. Au point de vue militaire je ne me fais aucune illusion, je ne serai moi aussi qu’un ‘‘revenant’’ »…
10 septembre. Après avoir évoqué sa sœur Marie-Agnès : « Malgré les nouvelles et ce que vous m’écrivez, je persiste à penser que nos affaires ne réussiront pas de la manière complète qu’il faut, d’ici à un certain temps encore »…
30 septembre. « Je suis ici [à Magdeburg] pour quelques jours et ne m’y trouve pas plus mal qu’ailleurs. Il est probable que je retournerai à Wülzburg au début de la semaine prochaine. Dans tous les cas, ne changez pas l’adresse de mes lettres ni de mes paquets, et continuez de me les expédier à Wülzburg. Ici, du matin au soir, nous n’avons qu’une pensée en tête : vous savez laquelle, et elle est réconfortante. » […]
LNC, I, p. 421, 422 et 424.