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Alexandre DUMAS. Trois articles sur George Sand.
[1853-1854].
Trois articles sur George Sand.
Estimation :
3 000 € - 4 000 €
Vendu:

Détails du lot

[1853-1854].
Trois articles sur George Sand.

3 manuscrits autographes signés.
10, 8 et 8 feuillets grand in-folio sur papier bleu écrits au recto et découpés pour l’impression.

le théâtre de george sand vu par dumas.

Brilllantes chroniques dans lesquelles Dumas analyse l’art de George Sand, le compare au sien, et la défend contre ses ennemis.

1) – Feuilleton dramatique. Mauprat drame en cinq actes et en 7 tableaux par George Sand. [1853].
La pièce a été créée à l’Odéon le 28 novembre 1853 et Dumas y a consacré trois chroniques les 30 novembre, 1er et 2 décembre dans Le Mousquetaire.

[…] On avait toujours dit : quel malheur qu’on ne puisse pas commencer par la seconde représentation. Eh bien, j’ai encore inventé cela moi, en tirant mes pièces de mes romans j’ai littéralement supprimé les premières représentations et commencé par les secondes.
Au reste selon le talent de l’auteur, cette méthode a son avantage et son désagrément. J’expliquerai plus tard pourquoi avantageuses pour moi elle devient désagrément à George Sand.

Dumas homme de théâtre s’intéresse au texte mais également à la décoration :

L’avant-scène de l’Odéon est large, trop large peut-être, elle doit avoir quelque chose comme trente-quatre ou trente-cinq pieds d’ouverture. Eh bien dans les drames intimes, sans mise en scène, sans figurants où les développements ne comportent pas une agglomération de plus de deux, de trois et même de quatre personnes il est urgent de diminuer en poussant le manteau d’Arlequin le théâtre de trois ou quatre pieds de chaque côté.
Au troisième tableau Bernard est chez le chevalier Hubert. Ce tableau est charmant d’un bout à l’autre. Seulement il est impossible à analyser. C’est le développement du caractère de Bernard et la confirmation de celui d’Edmée, l’amour qui se développe et qui grandit dans les deux jeunes gens, en fait les frais. Cependant durant tout l’acte Edmée conserve à la fois sa supériorité et sa puissance sur son cousin. C’est le propre de madame Sand de courber ses héros sous ses héroïnes. Je vous dirai : vous êtes femme, madame Sand, comme notre Molière disait vous êtes orfèvre Mr Jones.

2) – Georges [sic] Sand. Autre article publié à l’occasion de la création de Mauprat.

Personne ne conteste le génie de George Sand.
Nous allons donc particulièrement nous occuper de son talent.
Peut-être s’étonnera-t-on que nous fassions de ces deux mots deux choses distinctes.
À notre avis non seulement elles sont rarement réunies, presque toujours distinctes et quelquefois opposées.
Dieu seul donne le génie.
À l’occasion, l’étude, la persistence peuvent donner le talent. Avec le génie seul on reste pauvre si l’on est pauvre, avec le talent seul il est rare qu’on ne fasse pas fortune.
Corneille était un homme de génie sans talent, aussi est-il mort de faim.
Beaumarchais est un homme de talent sans génie aussi est-il mort millionnaire.
Madame Sand réunit le génie au talent ; seulement le génie est au talent chez elle dans les proportions bien supérieures.

Pour Dumas, les romans de Sand perdent à la représentation car Sand est un grand peintre de portraits ou de paysages, ce qui ne peut être rendu qu’imparfaitement au théâtre.
Il continue par un intéressant parallèle entre Sand et lui :

« Georges Sand est un intéressant romancier philosophe et sévère. Je suis un romancier – humaniste et vulgarisateur. Georges Sand avec beaucoup de peine et à force d’art arrive à être théâtrale. Moi sans peine et tout naturellement j’arrive à être dramatique. […] Roman ou drame, je ne commence matériellement mon œuvre que lorsqu’elle est complètement achevée dans mon cerveau. Roman ou drame Georges Sand commence son œuvre dès qu’elle a le premier chapitre ou qu’elle tient les premières scènes. […] Je suis le mouvement et la vie. Elle est le calme et la pensée.

3) – George Sand et Monsieur Jules Janin, publié dans le Mousquetaire du 13 novembre 1854.

Un jour dans une comédie en deux actes jouée au Gymnase le 1er septembre 1852 et intitulée le démon du Foyer Georges Sand eut l’imprudence de faire dire au prince – à quel prince ? – à un prince de sa fantaisie parbleu, eut l’imprudence de faire dire au prince, les paroles suivantes :
Le Prince en fumant
« Vous croyez que vous serez perdus pour avoir fui avec moi – Ah Canaris qu’est-ce que c’est donc que ces idées là, est-ce que je vous fais des conditions moi, me prenez-vous pour un gazetier ou un directeur de spectacles ».
Vous ne voyez rien de bien offensant n’est-ce pas pour la critique dans cette boutade d’un prince, qui affectant les belles manières du XVIIIe siècle, dit le mot gazetier au lieu du mot journaliste.
Eh bien cher lecteur, il n’en a pas été de même de la critique, ou plutôt d’une partie de la critique, dès le lendemain.

Parmi elle, Janin et quand Janin prêche une croisade on s’enrôle sous les drapeaux du prince de la critique, on fait serment de démolir Georges Sand et on se met en campagne contre l’auteur des plus beaux livres de notre époque, Indiana, Valentine, André, Jacques, Consuelo, Geneviève, Mauprat, le Champi, la Mare au Diable que sais-je moi, vingt chefs d’œuvre.

Et Dumas de répondre au compte-rendu que Janin fait de la pièce de Sand, Flaminio, (Journal des Débats, 6 novembre) représentée au Gymnase le 31 octobre 1854).
Janin ne peut supporter le succès de Sand et entend que l’on suive sa devise : qui hait les autres me suive. Dumas cite des extraits de l’article de Janin ainsi que des extraits de la pièce et se moque :

N’est-ce pas que vous voudriez bien écrire comme cela, Mr J. Janin. Mais que voulez-vous cela n’est pas donné à tout le monde. Voilà comment vous écrivez vous [Dumas cite Janin] Que dites-vous du style du prince de la critique, chers lecteurs.
Pauvre monsieur Jules Janin, avez-vous les nerfs irritables à l’endroit des succès des autres. Mais que diable vous font donc les succès de théâtre à vous qui n’avez jamais pu faire une pièce […] Ce que nous admirons dans Georges Sand […] c’est son grand et beau style comme auteur. C’est sa loyauté et sa fidélité comme ami, c’est sa constance et sa fixité d’opinion comme écrivain. C’est sa pitié pour ce qui est faible, c’est son admiration pour ce qui est fort. C’est sa fraternité pour ce qui est grand.

Les relations entre Dumas et George Sand furent longues à se mettre en place. La romancière dans ses lettres à Casimir Dudevant se moque d’ailleurs du théâtre de Dumas (Christine en mai 1830, Napoléon en 1831). Suit une rencontre manquée qui faillit se terminer par un duel entre Dumas et Gustave Planche défenseur de Sand. Après ces débuts difficiles, la réconciliation se fit, lentement, et Claude Schopp note que « Dumas est plutôt admirateur de l’œuvre qu’ami de la femme. » Les années passant, l’œuvre et la femme seront réunies dans une même admiration et Dumas ne cessera de la défendre. À sa mort, Sand témoigna : « Un mot d’Alexandre Dumas [Fils] pour m’apprendre la mort de son père. Il était le génie de la vie, il n’a pas senti la mort. Il n’a peut-être pas su que l’ennemi était à sa porte et assistait à sa dernière heure. »

On joint : 2 fragments d’articles
- 1 p. in folio paginée 5 contenant un fragment traduit de Sappho par Edouard Subecker.
- 1 p. in 4°, 1 p. in folio paginées 4 et 5, toujours en soutien de Georges Sand et contre Jules Janin à qui Dumas adresse une véritable « déclaration de guerre ».

Admirative défense de George Sand par Dumas.

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