'HORROR MASK TILE', BROWN-GREEN STONEWARE, BY J.-J. CARRIES
Commentaire :
Etrange face écrasée aux traits plissés, longues oreilles végétales pointues, expression inquiétante au large sourire et aux lèvres gercées, ce masque en grès aux reflets subtilement nuancés est un formidable exemple de l'imaginaire singulier de Jean-Joseph Carriès. Inspiré du monde médiéval et de l'art japonais, Carriès, sculpteur prolifique en constantes recherches techniques, découvre le grès lors de l'Exposition Universelle de 1878. Il travaille alors en statuaire ce matériau de potier et en obtient de fines et chaudes variations chromatiques, ici brun-vert, tirant sur l'ocre et la châtaigne. Il est possible que notre carreau soit un élément des piliers, couverts de près de six cent visages grimaçants, masques narquois et faunes germaniques, de la Porte Monumentale commandée au sculpteur en 1890 par Winnaretta Singer, future princesse Edmond de Polignac. Laissée inachevée, cette œuvre gigantesque - dont de nombreux carreaux sont aujourd'hui conservés au Petit Palais - devait ouvrir sur la pièce de son hôtel particulier renfermant le manuscrit de Parsifal, ultime œuvre de Wagner. Si rien n'atteste de sa destination finale, notre carreau au masque d'horreur demeure un objet empreint d'une vraie modernité, fruit d'une savante combinaison entre une inspiration mystérieuse et une remarquable expérimentation plastique.