Notes manuscrites préparatoires. 20 p. in-16 d'un carnet à spirale, dentelures en haut de page. Écriture dense et rapide à la mine de plomb. Écrit à Epalinges, Vaud, 1969. Publié aux Presses de la Cité, 1969.
Les notes manuscrites ici présentées sont celles du début du roman. Elles récitent comment Maigret et sa femme dînent chez le docteur Pardon, ami et médecin de la famille. À côté de chez lui, un crime a été commis sur un jeune homme, qui avait la passion des enregistrements sonores dans les cafés et restaurants louches et mystérieux. L'enquête est confiée à Maigret et, avec le docteur, ils sont les premiers à se rendre sur le lieu du meurtre. Ils vont être mis en relation avec l'assassin, un malade mental. Le docteur Pardon se confie sur son métier avec regret, au moment où ils sont appelés pour le meurtre. Le jeune homme assassiné, lui, est le fils d'un grand parfumeur parisien.
Ces notes manuscrites sont extrêmement riches : Simenon écrit beaucoup, chaque feuille contient plusieurs idées, des nombreux lieux d'action et des personnages. Le déroulement de l'enquête est si précis qu'il permet de voir l'intrigue se construire et le sujet se concrétiser. C'est comme si sur une petite feuille était retranscrite déjà la somme du roman. Georges Simenon est un maître de l'écriture : nous pouvons voir ici combien, sur seulement 20 pages, se réalise une architecture littéraire de précision chirurgicale.
" Si j'avais un fils et qu'il m'annonce son intention de devenir médecin, je crois bien que je tenterai de l'en dissuader… Pardon fatigué, surmené. […] Il adorait sa profession qui lui prenait pratiquement tout son temps. " Ils sont en train de faire de nous des fonctionnaires, de mauvais fonctionnaires. " […] Pluie depuis 3 jours. La Borne. C'est extrêmement urgent. […] Rue Popincourt 100 m. Un homme qui perd son sang - coup de couteau… - Pas téléphoné à la police ? - D'abord pensé à vous. L'eau dans les caniveaux. Eau déborde. "
" Normalement les journaux auraient consacré 4 lignes à cette affaire. Coup de couteau. Un jeune homme, C… a été frappé de plusieurs coups de couteau alors qu'il passait mardi soir rue Popincourt. Il s'agit vraisemblablement du geste d'un rôdeur qui, à l'approche d'un commerçant de la rue, a pris la fuite sans rien pouvoir emporter. Quant à la victime, elle a succombé dés son arrivé à l'hôpital St Antoine. "
Simenon fait la description du quartier, théâtre du crime. L'écrivain a barré " populeux " pour mettre " populaire " à sa place. Un quartier où n'aurait pas dû " traîner " le jeune homme de bonne famille : " Fait tuer à coups de couteau dans les rues populaires de Paris. Boutiques. Artisans sur les cours […], des vieilles femmes, des retraités. Des femmes font leur marché et aussi un certain nombre d'hommes seuls presque tous des vieux. Hector le boucher croit qu'il a poussé un bouton qui mit son appareil en marche. "
" Boutiques étroites et profondes. À cause du ciel bouché, lampes allumées produisaient un faux jour qui donnait aux gens l'aspect de personnage de cire. "
" Café des Amis. Patron à la cave. 2 garçons. Une serveuse. Plus ceux qui servaient au sous-sol. Terrasse protégée à la mauvaise saison par des cloisons vitrées. À chaque bout un brasero rependait sa chaleur. Guéridons, chaises qui, le soir, on pouvait emboîter les unes dans les autres. Pas de touristes en cette saison. "
" Description - celui qu'il a entendu appeler Mimile - Assez beau garçon, très brun. 35 ans. Un autre avec une cicatrice à la joue. Le 3 e encadreur rue du Faubourg St Antoine paraissait inquiet. Tel autopsie. Teleph. Pardon. "
Il suit après une page avec de grandes ratures, notes de lieux, de personnages non gardés, où l'on voit Maigret/Simenon tâtonner, encore dans le flou : " Journée d'aller et venue, de coup de téléphone. De mise en place. Maigret aime chercher à comprendre. Avec les professionnels il n'y avait rien à comprendre on suivait les règles du jeu. Le Lapin (Vert) [barré] Rose. Rue Fontaine Strip-tease. "
" Il y eu une sorte de conseil de guerre entre Maigret et son homologue. Discuté d'abord avec directeur de la P.J. puis avec le juge d'instruction. "
" À hauteur de Villacoublay tourne à gauche, encore à gauche. Traverser Jouy en Josas jusqu'à l'orée d'un petit bois. Le Grand Chêne, villa importante dans un jardin - sorte de parc - toutes lumières éteintes, les hommes salon. Arrestation. - J'ai entendu un client se vanter de posséder peinture Cézanne. "
La suite relate la rencontre avec un homme qui refuse d'être dépossédé de son crime ; il va se mettre en relation avec Maigret : " - C'est quelqu'un qui ne veut pas dire son nom. Il prétend que vous saurez qui il est.- Passez le moi…allo ! Après un court silence, une voix qui paraissait lointaine, - Allo…- Vous savez qui est à l'appareil ? - Oui. - Vous n'avez pas essayé de savoir d'où je vous téléphone ? - Non. - Pourquoi ? Parce que cela ne m'intéresse pas. - Vous ne me croyez pas ? - Si. […] "