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Attribué à Pierre-Paul Rubens Siegen, 1577 - Anvers, 1640
La Mort de Constantin
Estimation :
150 000 € - 200 000 €
Vendu:
187 674 €

Détails du lot

La Mort de Constantin
Huile sur panneau de chêne

Porte au revers une marque figurant le château d'Anvers et le monogramme du pannelier Michiel Vriendt, porte au revers une marque au pochoir 'WP 541'

'THE DEATH OF CONSTANTINE', OIL ON PANEL, ATTRIBUTED TO P.-P. RUBENS

Provenance :

Atelier Marc Comans et François de La Planche, Paris, avant 1627 ;
Probablement famille Comans ou famille de La Planche, Paris, avant 1640-1660 ;
Ancienne collection Henri ou Adrien de Valois, Paris, avant 1676 ou 1692, son cachet à la cire rouge au verso ;
Probablement ancienne collection James Brydges, 1st Duke of Chandos, Cannons, (Middlesex), avant 1744 ;
Probablement sa vente ; Londres (Cock), 7 mai 1747, n° 94 ;
Vente anonyme, Londres, 9 mars 1758, n° 38 (acquis par Scarlet) ;
Chez Curt Benedict, Paris, 1942 ;
Acquis par Rochlitz, Paris, en 1942 ;
Chez Jacques O. Leegenhoek, Paris, vers 1951 ;
Acquis auprès de ce dernier par René Küss en 1952 ;
Ancienne collection René Küss, probablement son cachet à la cire rouge à deux reprises au verso ;
Vente anonyme ; Londres, Christie's, 7 décembre 2006, n° 12 (adjugé £ 230.000, non réglé par l'acquéreur) ;
Resté dans la famille du professeur René Küss jusqu'à ce jour

Expositions :

'Oliverfshetsen van Rubens', Rotterdam, Boymans Museum, 1953-1954, p. 62-63, n° 40, fig. 39
'Anvers ville de Plantin et Rubens', Paris, Bibliothèque nationale, 1954, p. 247, n° 403
'Constantin the Great. The Tapestries-The Designs', Philadelphie, Philadelphia Museum of Art, 1964, p. 51, n° 7a, p. 53, fig. 28, porte l'étiquette au verso
'La Mort de Germanicus de Poussin au Musée de Minneapolis', Paris, Musée du Louvre, 1973, p.9-10, n° 10, repr.

Bibliographie :

Leo Van Puyvelde, 'Rubens', Paris-Bruxelles, 1952, vol.II, p. 209-210, note 138 [2e ed. Bruxelles, 1964, p. 255-256, note 19]
Ludwig Burchard et Roger Adolf d'Hulst, 'Rubens Drawings', Bruxelles, 1963, t. II, p. 211, mentionné dans la notice du n° 133
David DuBon, 'Tapestries from the Samuel H.Kress collection at the Philadelphia Museum of Art, the History of Constantine the Great designed by Peter Paul Rubens and Pietro da Cortona', Londres, 1964, p. 116, mentionné dans la notice du n° 7, fig. 63
Svetlana Alpers, 'Corpus Rubenianum Ludwig Burchard. IX : The Decoration of the Torre de la Parada', Bruxelles, 1971, p. 192, mentionné dans la notice du n° 10a
Pierre Rosenberg, "La Mort de Germanicus de Poussin", in 'La Revue du Louvre et des Musées de France', 1973, XXIII, p. 139, n° 2, fig. 5
Anthony Blunt, " Poussin's 'Death of Germanicus' lent to Paris", in 'The Burlington Magazine', CXV, 1973, p. 533
Julius Samuel Held, 'The oil sketches of Peter Paul Rubens', Princeton, 1980, t. I, p. 83-84, n° 50 et t. II, repr. pl. 51
Didier Bodart, 'Rubens', Milan, 1985, p. 182, n° 593, repr.
Peter Krüger, 'Studien zu Rubens' Konstantinszyklus', Francfort-New York, 1989, p. 205-208 et p. 280, fig. XIIb / 1.1
Michaël Jaffé, 'Rubens Catologo Completo', Milan, 1989, p. 269, mentionné dans la notice du n° 691 (comme copie)
Marjon Van der Meulen, 'Corpus Rubenianum Ludwig Burchard. XXIII : Copies after the antiques', vol. I, p. 117 et 126, fig. 69
Marc Fumaroli, "Cross, Crown and Tiara : the Constantine myth between Paris and Rome (1590-1690)", in M.A. Lavin, 'Piero della Francesca and his legacy', Washington D.C.,1995, p. 91-92, fig. 2
Jan Van Tichelen, "De Geschiednis van Constantijn / The History of Constantine", in G.Delmarcel et alii, 'Rubens's Textiles', cat. exp., Anvers, 1997, p. 59-61 et p. 76
Pascal-François Bertrand, 'Les tapisseries des Barberini et la décoration d'intérieur dans la Rome baroque', Turnhout, 2005, p. 179, note 155
Alexis Merle du Bourg, 'Peter Paul Rubens et la France, 1600-1640', Lille, 2004, p. 31 et p. 199, note 107
Nicola van Hout, " The oil sketch as a vehicle for Rubens's creativity ", in cat. exp. Drawn by the brush : Oil sketches by Peter Paul Rubens, Greenwich, Berkeley, Cincinnati, 2005, note 16
Rolf Quednau, " Zum Wandel des Konstantin-Bildes in der Kunst : Raphaël und Rubens / Pietro da Cortona", in A. Demandt et J. Engemann,'Konstatin der Grosse. Geschichte-Archäologie-Rezeption', Trier, 2006, p. 278, note 39
Koenraad Brosens, "Who commissioned Rubens's Constantine series ? A new perspective : the entrepreneurial strategy of Marc Comans and François de la Planche", in 'Simiolus. Netherlands quarterly for the history of art', vol. 33, 2007/2008, n° 3, p. 166 et p. 181, fig. 12
Koenraad Brosens, "A case of mistaken identity : Rubens's so-called 'Constantin and Crispus' oil sketch in Sydney", in 'The Burlington Magazine', CLIII, 2011, p. 89, fig. 15
Koenraad Brosens, 'Corpus Rubenianum Ludwig Burchard. XIII : Subjects from History. 3. The Constantine Series', Turnhout, 2011, p. 239-240, n° 12a, fig. 105

Commentaire :
L'année 1622 vit l'arrivée à Paris de Pierre-Paul Rubens. Appelé par la reine mère Marie de Médicis pour réaliser le célèbre décor de la galerie du Luxembourg, le maître d'Anvers était alors à la tête d'un atelier prospère et jouissait d'une importante notoriété au sein des cours princières européennes.
C'est au cours de cette période que la tenture de la 'Vie de Constantin' lui fut commandée. Celle-ci fut tissée dans l'atelier parisien de Marc de Comans et François de La Planche situé faubourg Saint Marcel. L'iconographie de cette suite - Constantin, premier empereur chrétien et par conséquent exemplum virtutis - a longtemps laissé penser que son commanditaire n'était autre que Louis XIII lui-même. C'est également ce que Rubens semblait suggérer dans sa correspondance avec Fabri de Peiresc.
Koenraad Brosens a cependant démontré que 'La Vie de Constantin' aurait en fait été illustrée par Rubens à la demande des lissiers Marc de Comans et François de La Planche, soucieux de consolider la réputation de leur atelier et de renouveler leur production (1). Leur objectif était néanmoins d'attirer l'attention du souverain sur cette tenture et l'on sait que Louis XIII en posséda un tissage dont il offrit sept pièces en 1625 au légat Francesco Barberini (2).
Plusieurs esquisses peintes par Rubens pour préparer cette commande sont aujourd'hui connues et reconnues par la plupart des spécialistes comme étant réalisées par Rubens lui-même. Cette composition sera par la suite transcrite sur un carton aux dimensions finales qui servira au tissage et sera alors reproduite en sens inverse. Le musée de Philadelphie conserve aujourd'hui la tapisserie correspondante qui faisait partie de l'ensemble offert au cardinal Barberini (fig. 1).
La composition de la tapisserie ne présente guère de différences avec l'esquisse que nous présentons et atteste du caractère abouti des études réalisées par le maître anversois. Seules les couleurs employées présentent quelques variantes. Notre panneau de petites dimensions est peint avec précision et l'on distingue parfaitement tous les détails de la composition finale que l'on retrouve dans un format bien plus grand dans la tapisserie de Philadelphie (489 x 498 cm). Il semble que Rubens avait à l'origine songé à représenter 'Le Triomphe de Rome' pour conclure ce cycle (3), avant de se décider pour 'La Mort de Constantin'.

Ce dernier épisode du cycle de Constantin représente la fin de la vie de l'Empereur romain. Celui-ci mourut le 22 mai 337 à Ancyrona, faubourg de Nicomédie, alors qu'il partait en campagne contre les Perses. Allongé sur un lit à l'antique, Constantin tient dans ses mains l'orbe, symbole de l'Empire romain, qu'il tend à ses trois fils. Derrière l'Empereur se tiennent deux ecclésiastiques, rappelant qu'il fut baptisé sur son lit de mort par l'évêque de Nicomédie. Au pied de son lit se trouve une femme pleurant et, couché au sol, un chien dort, étranger au drame en train de se dérouler.
Pierre-Paul Rubens emploie une composition à l'antique, avec une frise de personnages. La mort de Constantin est théâtralisée par un important dais, motif traditionnel de l'iconographie royale. Le mobilier, les costumes des différents personnages ainsi que la niche esquissée à l'arrière-plan témoignent du souci du peintre de donner à la scène son caractère historique, tandis que la narration est idéalisée : les sources indiquent en effet que les fils de Constantin n'étaient pas présents à la mort de leur père (4).
'La Mort de Constantin' pourrait en outre avoir influencé l'un des chefs-d'œuvre de Nicolas Poussin, peintre " classique " traditionnellement opposé au métier " baroque " du maître anversois. Pierre Rosenberg a en effet souligné la proximité de cette composition avec celle de 'La Mort de Germanicus' commandée en 1626 à Poussin par le cardinal Francesco Barberini et livrée en 1628 (fig. 2) (5). Peint dans le même sens que notre esquisse, le tableau de Poussin représente également le général romain sur son lit de mort sous un vaste dais, avec une pleureuse à droite et une ouverture vers un arrière-plan architecturé à gauche. Poussin put avoir connaissance de l'œuvre de Rubens par l'esquisse avant son départ pour Rome en 1624, ou encore par la tapisserie, puisque son commanditaire Francesco Barberini possédait la série offerte par Louis XIII. Ce probable ascendant d'une composition de Rubens sur un tableau de Poussin vient repousser les frontières habituellement admises par l'histoire de l'art et nous fournit un exemple supplémentaire de l'immense postérité du maître anversois.

Au sein du catalogue d'exposition 'Drawn by the brush : Oil sketches by Peter Paul Rubens' (2005), Nicola van Hout sépare la série des esquisses préparatoires à la Vie de Constantin en deux parties : une première constituée de scènes de bataille enlevées avec de multiples figures (6), et une seconde réalisée sur des panneaux de plus petites dimensions et présentant moins de souplesse et d'invention (7). Il classe l'esquisse de 'La Mort de Constantin' dans la seconde catégorie qu'il considère comme étant vraisemblablement un travail d'atelier. A sa suite, David Jaffé remet en cause l'authenticité de notre esquisse ainsi que de celles appartenant au second groupe. Dans ce groupe figure également 'Le Labarum', de dimensions proches de notre panneau (35,50 x 27,50 cm) et portant la même marque du pannelier Michiel Vrient. Cette esquisse du Labarum s'est vendue chez Sotheby's à New York le 31 janvier 2013 pour 902.500 $ (lot 26). Reconnues comme authentiques par le Rubenianum, ces esquisses figurent dans de nombreuses publications, y compris dans le tome du Corpus consacré à cette suite de tapisseries et publié en 2011 (voir bibliographie ci-dessus).

[1] Koenraad Brosens, "Who commissioned Rubens's Constantine series ? A new perspective : the entrepreneurial strategy of Marc Comans and François de la Planche", in Simiolus. Netherlands quarterly for the history of art, vol. 33, 2007/2008, n° 3, p. 166-182
2. Cet ensemble est aujourd'hui conservé au Philadelphia Museum of Arts.
3. Une esquisse se trouve en effet au Mauritshuis à La Haye.
4. Voir Julius Samuel Held, 'The oil sketches of Peter Paul Rubens', Princeton, 1980, t. I, p. 84
5. Huile sur toile, 148 x 198 cm. Le tableau est aujourd'hui conservé à l'Institute of Arts de Minneapolis. Voir 'La Mort de Germanicus' de Poussin au Musée de Minneapolis, Paris, Musée du Louvre, 1973, p.10
6. Premier groupe : 'Les Mariages de Constantin et de Fausta et de Constance avec Lucinius', 'L'apparition du monogramme du Christ', 'La bataille du pont Milvius et la mort de Maxence', 'L'entrée triomphale de Constantin dans Rome', 'Le baptême de Constantin et La Rome triomphante' (Held, 1980, n° 39, 40, 42, 43, 45, 47 et 51)
7. Second groupe : 'Le Labarum', 'Le Trophée', 'Constantin confie à Crispus le commandement de la flotte', 'Constantin adorant la Vraie Croix', 'La Fondation de Constantinople' et 'La Mort de Constantin' (Held, 1980, n° 41, 44, 46, 48, 49, and 50).

Un certificat du Art Loss Register en date du 3 avril 2013 est disponible sur demande.

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