De quatre ans plus jeune que son frère Edouard Detaille, peintre de sujets militaires, Charles Detaille se spécialise dans les portraits équestres, les sujets de sport et de courses de chevaux. Illustrateur fameux, Detaille a collaboré à de nombreux journaux sportifs comme Le Sport ou La Vie Sportive. Réputé pour son élégance de parfait gentleman, l'artiste avait son atelier avenue de la Grande Armée, dans le quartier des principaux manèges qui avaient l'avantage d'être en bordure du bois de Boulogne et où résidaient de nombreux membres du Jockey-Club et beaucoup d'amateurs d'équitations.

Héritier, en 1840, d'un important patrimoine, le baron Auguste Lupin (1807-1895) se passionne très jeune pour les chevaux de course. Comme de nombreux autres jeunes dandy, il est jockey amateur avant de fonder sur le modèle anglais, en 1833, avec ses amis lord Henry Seymour, Anatole Demidoff et le duc d'Orléans, la fameuse Société d'encouragement pour l'amélioration des races de chevaux. En 1845, Lupin établit une écurie de course à Vaucresson pour entraîner les nombreux pur-sang qu'il fait venir d'Angleterre. Son plus fameux cheval sera Dollar, vainqueur de nombreuses courses, pour lequel il achète en 1867 le haras de Viroflay afin d'y loger son étalon. En 1872, c'est là que nait le pur-sang Salvator, de Dollar et de Sauvagine.

Entraîné par Joseph Hayhoe et monté par le jockey Wheeler habillé aux couleurs du baron Lupin, casaque noire et toque rouge, Salvator remporte plusieurs courses en 1874 (Prix de l'Espérance, Grand Prix de Deauville, etc.). Mais il est surtout resté célèbre dans les annales hippiques pour avoir remporté, en 1875, le Prix du Jockey-Club à Chantilly et, deux semaines plus tard, le Grand-Prix de Paris à Longchamp. Salvator est le second cheval à réussir le doublé de ces deux prix prestigieux et seuls vingt-deux autres chevaux lui ont succédé jusqu'à aujourd'hui : Lupin pouvait être fier de son œuvre et le face à face entre le propriétaire et son cheval est saisissant. Cette œuvre inachevée est probablement une esquisse pour un tableau de plus grand format dont la localisation est aujourd'hui inconnue. Après son doublé, Salvator ne participe plus qu'au Grand Prix de Deauville de 1876 où il est classé second. Vendu en Angleterre comme étalon, il sera le père de deux vainqueurs, Ossian et Lapin.