Hugo Desnoyer exerce son artisanat rue Boulard, petite artère du quatorzième arrondissement de Paris. Sa boutique frangée de vitrines agencées avec l'élégance d'une bijouterie tutoie la place Jacques Demy. " Boulard ", un nom qui se prononce en traînant la finale en " lard " et fleure bon la France artisanale, les films de Chabrol et les dialogues d'Audiard.
Hugo Desnoyer a l'empathie d'un grand garçon fier de son art et de sa réussite. Son allure d'acteur doux et soyeux, son visage de toréador, campent l'intrigante beauté du boucher. Un métier à l'aura trouble si l'on se remémore l'imagerie populaire ou le vers de Baudelaire : " Je te tuerai sans colère et sans haine. Comme un boucher. "
" Dans mon métier, si l'on ne devait retenir qu'un seul geste, ce serait la découpe... C'est le corps tout entier qui se porte en avant, pèse et tranche… L'épaule impulse le bras." Hugo Desnoyer embrasse un train de côtes de bœuf : liés et ployés ils dansent, ils ne font qu'un. La côte sitôt entaillée s'enlumine d'entrelacs carmin et ivoire sous la coupe parfaite, nette et " glacée ". Hugo Desnoyer rejoint la concision de Colette dans Le Fanal bleu : " Un boucher coupant, tranchant, élaguant, ficelant, façonnant vaut un danseur, un mime. "
Natif de Mayenne, il débute son apprentissage à l'âge de 15 ans. Quatre-vingt heures par semaine, cent trente grammes de viande hachée le soir, un lit de fortune dans la cuisine de la boucherie, voilà pour le tarif ; c'était en 1990 à Paris ! A 27 ans, avec sa femme Chris, il ouvre sa boucherie et la nomme d'un mot d'ordre : Régalez-vous ! Les heures filent, les week-ends coulent à la vitesse de leur Polo gris métallisé sillonnant les routes et les champs, à la recherche de vaches et de veaux d'or.
Aujourd'hui, celui que l'on afflige du titre de boucher des stars, en un double sens, des grands chefs étoilés comme des people, conserve le cap et trace sa route à la rectitude du devoir bien fait. Lever à quatre heures du matin, découpes, bridages... et rideau tiré à vingt heures. Une autre journée commence et donne à son métier une véritable reconnaissance à l'égal de celle de nos papilles.

Vendu au profit de la Croix Rouge


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