Commentaire :
Peintre de l'Académie de Saint Luc dont son père est le directeur, c'est en 1707, à l'âge de 20 ans, que Jean-Baptiste Oudry entra dans l'atelier de Nicolas de Largillierre. Ce dernier était alors à l'apogée de sa carrière de portraitiste et enseigna son art au jeune Oudry pendant cinq ans. A l'issue de cet apprentissage, les liens entre les deux hommes restèrent très étroits et Oudry rendra un vibrant hommage posthume à son maître à l'occasion de deux conférences prononcées à l'Académie royale en 1749 et 1752. Le tableau que nous présentons est une des premières toiles peinte par le jeune artiste, qui a ici représenté les personnages de la Commedia dell'arte alors tant appréciés de ses contemporains.
Seule version signée et datée de cette composition de l'artiste pour laquelle au moins une autre version considérée comme autographe est répertoriée1, cette scène semble avoir connu un réel succès au regard de plusieurs copies anciennes existantes2. La composition fut aussi gravée en sens inverse - probablement dans la première moitié du XVIIIe siècle - par un graveur non identifié.
Inédit à ce jour et conservé depuis plus d'un siècle dans une collection familiale à Blois, ce séduisant tableau nous plonge dans l'univers raffiné des premières années qui suivent la mort du roi Louis XIV. Trois comédiens italiens courtisent deux élégantes. Arlequin tend son chapeau vers celle appuyée sur le socle du grand vase orné d'une scène de triomphe marin. Pierrot inviterait-il la seconde à le suivre ? Assise à même le sol elle retient son chien mais semble ignorer ces avances en se cachant derrière son éventail. La palette rosée et les verts clairs métalliques et acides caractéristiques des œuvres de jeunesse d'Oudry rendent le tableau particulièrement frais et agréable.
1. Huile sur toile, 0,65 x 80 cm., Galerie de la fondation Leventis, Nicosie, Chypre (H. Opperman, Jean-Baptiste Oudry, New York, 1977, p. 398-399, n° P105, fig. 37 et H. Opperman et K. Chastagnol in A. G. Leventis Foundation. The Paris Collection. 17th to 20th Century European Art, Athènes, 2013, p. 88-89). Lors de l'exposition de 1982-1983, cet exemplaire était considéré comme pouvant avoir été réalisé vers 1715 (cat. exp. J.-B. Oudry, Paris, Grand Palais, p. 61).
2. Citons notamment celle acquise par le musée des beaux-arts de Bordeaux en 2007, cataloguée comme autographe par Hal Opperman en 1982 (cat. exp., op. cit., p. 60-62, n° 15) et qui se trouve en réalité être une copie d'atelier de moindre qualité. Plusieurs autres copies anciennes sont mentionnées dans le catalogue de l'exposition Oudry de 1982-1983.