Né à La Haye en 1874, Salomon-Léon Sarluis se distingue très jeune par son talent pour le dessin. Rapidement surnommé Léonard en référence à de Vinci, il entre à l'Académie Royale des beaux-arts de sa ville natale en 1891. Après deux années de formation, il se rend en France, à Paris, et se lie rapidement avec les artistes proches du courant symboliste grandissant. Armand Point le présente aux avant-gardes belges puis lui permet de rencontrer l'influent Joséphin Péladan, ce dernier lui ouvrant les portes de son Salon de la Rose-Croix dès 1896. Il réalisa aussi pour ce salon cette même année, l'affiche de l'événement, figurant Persée tenant la tête sanguinolente d'Emile Zola, sempiternel défenseur des naturalistes à la même époque. Par ce fait d'arme, qui lui valut l'honneur du scandale, notre artiste rentrait officiellement dans le camp des symbolistes, en radicale opposition avec celui défendu par l'auteur de Germinal.
S'en suit chez Sarluis la création d'une esthétique propre qui séduit le tout-Paris artistique de l'époque. Adoubé par Puvis de Chavannes ou encore Oscar Wilde, il développe alors son style, proposant une synthèse de ses influences plastiques : le symbolisme conjugué des élèves de Gustave Moreau et de la nouvelle avant-garde belge mais surtout l'art préraphaélite né outre-Manche au milieu du XIXe siècle.
Notre toile, peinte en 1924, constitue un brillant exemple de l'art et la manière de notre artiste. Elle figure un jeune éphèbe dont l'inspiration mélancolique est nourrie par le jeu de harpe de sa muse qui semble vouloir lui imposer sa pensée. L'œuvre dénote également par l'influence tardive chez Sarluis du courant Art déco qui se développa dans les arts décoratifs durant la première moitié du XXe siècle et qui connait son plein essor dans les années 1920.