Comment:
Le Passage du Granique est la première grande victoire d'Alexandre dans sa conquête de la Perse. Alexandre quitte la Macédoine en 334 av. J.-C. avec une armée de 30 000 fantassins et de 5 000 cavaliers. La première rencontre avec l'armée perse se déroule au bord du fleuve Granique (actuel Biga Çay, en Turquie). Alexandre, suivant le conseil de Thucydide " Celui qui attaque le premier, épouvante l'ennemi ", traverse le Granique à la tête de son armée et met en déroute l'armée perse. Cette victoire lui ouvre les routes de l'Asie mineure. De nombreux siècles plus tard, en 1672, Louis XIV fera à son tour preuve d'une audace et d'un instinct similaires en franchissant le Rhin avec son armée devant Tolhuis lors de la guerre de Hollande.
Le tableau monumental de Charles Le Brun (fig. 1), réalisé en 1665, appartient à un cycle de quatre toiles consacrées aux conquêtes d'Alexandre Le Grand, conservé au musée du Louvre. Il reprend le moment où la cavalerie macédonienne commandée par Alexandre passe le fleuve et se heurte à la cavalerie perse. Alexandre se retrouve acculé par plusieurs cavaliers perses alors qu'il combat avec Memnon. Il doit la vie à Clitus, un de ses fidèles compagnons, qui terrasse d'un coup de hache un cavalier perse qui tente de le tuer par derrière. Notre étude est préparatoire à un cavalier tombé de son cheval lors du passage du fleuve et qui se retient tant bien que mal à un tronc d'arbre en bas à droite du tableau. Le Brun tente de montrer le caractère impétueux du fleuve qui désarçonne les cavaliers, ce qui renforce l'effet de mouvement et d'intrépidité de la cavalerie macédonienne.
On remarque particulièrement dans ce dessin l'influence de Raphaël, l'attitude dynamique étant très inspirée par La Bataille du Pont Milvius, réalisée à la fresque par Giulio Romano en 1519, d'après les dessins de Raphaël dans la salle de Constantin au Vatican. Nous pouvons également comparer ce dessin avec une figure de Raphaël conservée à l'Ashmolean Museum (voir C. Whistler et B. Thomas, 'Raphael the Drawings', Oxford, Ashmolean Museum, 2017, n°113, repr.).
Plusieurs autres dessins de Le Brun, conservés au musée du Louvre, sont préparatoires à la même composition et de technique similaire (voir L. Beauvais, 'Inventaire général des dessins de l'école française. Charles Le Brun', Paris, 2000, t. I, n° 1747, 1750, 1751, 1752, 1766, repr.).