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Lucien LÉVY-DHURMER (1865-1953)
Rocher dans les calanques du Trayas à l'Esterel par beau temps
Estimation:
€4,000 - €6,000
Sold :
€12,350

Lot details

Rocher dans les calanques du Trayas à l'Esterel par beau temps
Pastel


Rock in the Trayas Calanques, Esterel, at sunshine, pastel, by L. Levy-Dhurmer

Comment:
Méditerranée : Calanques de l'Estérel

Si les dates des voyages à l'étranger et des séjours en province de Lévy-Dhurmer ne sont connues que très partiellement, son activité de céramiste chez Clément Massier à Golfe Juan de 1888 à 1895 témoigne de sa connaissance précoce de la côte méditerranéenne. Né à Alger, le peintre ne pouvait d'ailleurs qu'avoir conservé une sensibilité particulière pour la lumière méridionale et il se plut à retourner en Afrique du Nord, laissant une œuvre orientaliste conséquente. C'est toutefois sur la Côte d'Azur où " il retourne souvent " que Lévy-Dhurmer réalise un certain nombre de pastels et d'huiles dans les années 1920-1930. Parmi ceux-ci, la série des calanques est particulièrement remarquable. En 1936, le peintre expose un Quatuor de calanques au Salon de la Société nationale des Beaux-Arts, représentant un de ces sites remarquables à différentes heures de la journée (Matin, Six heures du soir, Crépuscule, Nuit) ; l'une de ces toiles appartient au musée d'Orsay. Il est cependant probable que Lévy-Dhurmer s'intéressa à ces sites avant les années 1930. D'autres œuvres isolées reprenant les mêmes motifs, horizontales ou verticales, à l'huile ou au pastel, sont conservées dans différentes collections et institutions (Musée de Brest, National Gallery of Washington etc.). Certaines de ces pages les plus connues s'inspirent du massif des Calanques de Marseille, à la roche blanche, et l'artiste y joue des contrastes du bleu phosphorescent de l'eau avec les parois calcaires, non sans en rendre parfois la vision onirique. Les trois pastels appartenant à l'ensemble qui nous retient ici montrent plutôt une roche rouge et brune. On peut toutefois écarter l'idée de paysages bretons, dont ni la couleur de la mer et des roches, même bréhatines, ni la topographie n'est comparable. En revanche, il ne fait guère de doute que Lévy-Dhurmer visita les Calanques de l'Estérel et admira leurs rochers rouges. Dès 1898, Gustave Soulier mentionne d'ailleurs " les aspects de notre littoral méditerranéen, les pins du golfe Juan, le profil de l'Estérel " comme " connus " du peintre . S'agissant précisément de ces Calanques, l'accès et la vue en furent grandement facilités à partir de 1903, après l'inauguration sensationnelle de la Corniche de l'Estérel, dite Corniche d'Or, à l'instigation du Touring Club de France et après deux ans de travaux colossaux. Il fallait jusqu'à cette date traverser le massif de l'Estérel pour rallier Cannes depuis Saint-Raphaël ; la nouvelle route, creusée dans les roches volcaniques, serpente au plus près du rivage et longe entre autres les calanques rouges d'Anthéor et du Trayas. On retrouve ainsi dans deux des pastels de l'artiste qui nous intéressent très exactement le motif de l'un des rochers remarquables de ce site, plusieurs fois reproduit en carte postale à l'époque et postérieurement (fig. 6), tant du point de vue de la géographie que du coloris. Aucun doute n'est donc possible quant au site représenté par le peintre.

Tandis que dans ses Calanques de la région marseillaise, Lévy-Dhurmer exploite la blancheur de la roche, c'est ici la couleur du porphyre qu'il fait contraster avec le bleu de la mer. L'artiste choisit de varier légèrement son point de vue sur ce motif, très simple en termes de composition mais qui permet, par une vue plongeante, de confronter les masses rocheuses aux couleurs de la mer, sans échappée vers l'horizon. Le traitement chromatique, du plus clair au plus profond, renvoie à différents moments de la journée avec un effet de série comparable à celui mis en œuvre dans les pastels vénitiens. La technique, très caractéristique du Lévy-Dhurmer des années 1910-1920, associe une sorte d'impressionnisme revisité, ces lignes de couleur " d'une légèreté aérienne " évoquées par Francis de Miomandre, à un chromatisme à la fois riche et subtil. Un troisième pastel, de forme horizontale, représente les Calanques de l'Estérel à travers des avancées rocheuses et une grande partie en est, cette fois-ci, consacrée à la mer ; l'artiste y donne la démonstration de sa capacité à adopter une facture mouvementée, tout comme dans le traitement des côtes et de leur végétation.
À travers cet ensemble restreint d'œuvres et de motifs, d'une très belle qualité d'inspiration et de technique, c'est comme un résumé de l'art du paysage et du pastel de Lévy-Dhurmer qui nous est donné. L'artiste y fait preuve d'une singularité toujours reconnaissable et d'un sens à la fois plastique et poétique qui ne trouve guère d'équivalent à son époque.

Jean-David Jumeau-Lafond, juillet 2016

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